Berlin, sous pression des députés de la majorité, a précisé ses conditions à une nouvelle aide à la Grèce : il faut que les banques renoncent pendant sept ans au remboursement de leurs fonds, une exigence qui est loin de susciter l'unanimité en Europe.
Dans un courrier adressé à ses homologues de la zone euro, rédigé lundi et rendu public mercredi, le ministre des Finances Wolfgang Schäuble a expliqué comment il voyait les choses : "un échange d'obligations conduisant à un allongement de sept ans (de la maturité) des obligations d'Etat grecques en circulation".
Le ministre exige depuis plusieurs semaines, jusqu'ici sans préciser sous quelle forme, que les créanciers privés soient impliqués dans le nouveau plan d'aide à la Grèce en cours de négociations.
Cette participation des banques et fonds d'investissement doit permettre "une répartition équitable du fardeau entre le contribuable et les investisseurs" selon la formule du porte-parole du ministère des Finances Martin Kreienbaum mercredi. Une exigence forte des députés allemands de la majorité.
A peine rentrée des Etats-Unis, la chancelière Angela Merkel est d'ailleurs venue évoquer le cas grec devant les groupes parlementaires libéral puis conservateur, pour tenter de calmer les esprits échauffés par la perspective de devoir à nouveau tendre la main à Athènes.
"J'ai rarement vu un échange aussi vif", a commenté pour l'AFP un député libéral (FDP) après la session, qui a duré plus de trois heures. Mme Merkel a repris et défendu les positions exprimées par M. Schäuble dans sa lettre, a-t-il dit.
Celui-ci, venu lui aussi défendre le sauvetage de la Grèce devant les députés, a indiqué être quasiment assuré du soutien du Fonds monétaire international (FMI) pour ses idées, selon ce participant. Mais le ministre a reconnu que convaincre la Banque centrale européenne (BCE) ne sera pas une mince affaire.
Le président de la BCE Jean-Claude Trichet, fermement opposé à l'idée d'une restructuration de la dette grecque, a tout juste ouvert lundi soir la porte à un "rollover", un scénario qui verrait les banques créancières s'engager à racheter d'autres obligations grecques quand celles qu'elles possèdent arriveront à échéance.
Or, les propositions de M. Schäuble vont nettement plus loin: l'Allemagne veut un véritable rééchelonnement, et d'envergure. Il doit être assez long pour "donner à la Grèce le temps de mettre en oeuvre pleinement les réformes nécessaires et de regagner la confiance du marché".
Le ministre réclame une contribution "substantielle" des détenteurs de titres grecs, "allant au-delà d'une approche du type +initiative de Vienne+".
Ce modèle, qui avait vu les banques autrichiennes maintenir leurs engagements en Roumanie puis en Hongrie et en Lettonie en 2009, a les faveurs de la Commission européenne, et de la France.
S'exprimant en Allemagne mercredi soir, le commissaire européen Olli Rehn a répété son opposition à un restructuration de la dette grecque. Même fin de non recevoir à Paris. La ligne de la France, c'est "le refus de la restructuration de la dette grecque", a réagi mercredi le porte-parole du gouvernement François Baroin.
"Quelqu'un va devoir céder", prédit Christoph Rieger, analyste de Commerzbank, et selon lui l'Allemagne devra vraisemblablement renoncer à une partie de ses exigences.