Les Européens, unis derrière la candidature de Christine Lagarde au Fonds monétaire international, ont profité du sommet du G8 jeudi à Deauville (France) pour plaider la cause de leur championne, qui a reçu un coup de pouce important de la part d'Hillary Clinton.
"Ce n'est pas au G8 que l'on décide de la nomination du directeur général du FMI (...), le G8 n'est pas le directoire du monde", a lancé le chef de l'Etat français Nicolas Sarkozy, tout en reconnaissant que la question avait été évoquée lors de rencontres bilatérales.
Même discours en deux temps du président de l'Union européenne Herman Van Rompuy: "On n'est pas ici pour faire du lobbying", mais les Européens sont prêts à énumérer les "qualités" de la ministre française des Finances aux dirigeants des grandes puissances.
L'ONG Oxfam a d'ailleurs accusé le G8 de "mijoter" un accord "en cuisine".
Au lendemain de l'annonce de candidature, Nicolas Sarkozy a en tout cas pu se réjouir des "échos" positifs qui émanent des coulisses de Deauville, station balnéaire du nord-ouest de la France.
Jusqu'ici très prudents, les Etats-Unis ont fait jeudi un pas important en direction de Christine Lagarde.
"Je l'admire", a lâché Hillary Clinton.
La secrétaire d'Etat américaine a certes rappelé que son pays souhaitait "officiellement" attendre la clôture des candidatures, le 10 juin, pour afficher sa "préférence". "Mais à titre officieux et personnel, je suis très partisane de donner aux femmes qualifiées - ce qu'elle est bien sûr - l'opportunité de diriger des organisations internationales", a-t-elle ajouté.
Cette déclaration en forme de portrait-robot de la Française, seule femme en lice pour l'instant, pourrait dégager la voie pour sa candidature, le soutien américain étant crucial.
D'autant que les autres puissances, si elles n'ont pas clairement exprimé leur position, n'ont pas non plus opposé de veto à Christine Lagarde qui brigue la succession de son compatriote Dominique Strauss-Kahn, contraint la semaine dernière à la démission après sa mise en accusation à New York pour tentative de viol.
La ministre française doit encore surmonter deux obstacles de taille.
D'abord, une éventuelle candidature des pays émergents pourrait se dresser sur son chemin, même s'ils semblent peiner à s'entendre sur un nom.
L'Inde a fait savoir que les émergents étaient "en contact" pour soutenir un candidat commun. Et la Chine est restée muette sur ses intentions, se bornant à réclamer une "consultation démocratique".
Jusqu'ici, les candidatures du Mexicain Augustin Carstens et du Kazakh Grigori Martchenko n'ont pas réussi à fédérer. D'autres noms circulent, comme l'Israélo-Américain Stanley Fischer, qui a reconnu jeudi qu'il s'agissait d'un "poste passionnant", ou le Sud-Africain Trevor Manuel.
Le groupe des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) a fermement dénoncé la règle tacite octroyant la direction du FMI à un Européen et la présidence de la Banque mondiale à un Américain. Mais la Russie a aussi laissé entendre qu'elle était prête à soutenir Christine Lagarde.
Cette dernière devrait donc se rendre dans les tout prochains jours en Chine et au Brésil.
L'autre obstacle demeure une éventuelle enquête judiciaire pour abus d'autorité, en France, sur le rôle de la ministre dans le règlement d'un litige opposant l'homme d'affaires Bernard Tapie à la banque Crédit Lyonnais. Une décision de la justice pourrait intervenir le 10 juin, mais l'intéressée a affirmé qu'elle irait jusqu'au bout, quoi qu'il arrive.
"Elle est tout à fait libre de maintenir sa candidature quoi qu'il en soit, il y a toujours la présomption d'innocence", a estimé Herman Van Rompuy.
Nicolas Sarkozy a de son côté minimisé "les risques", qu'il a jugé "aisément maîtrisables".