L'Italien Mario Draghi devrait franchir lundi une étape importante en vue de succéder à Jean-Claude Trichet au poste clé de président de Banque centrale européenne, avec un feu vert de principe attendu des ministres des Finances de la zone euro.
Grand favori de la course, le gouverneur de la Banque d'Italie a tenu à couper court aux rumeurs indiquant qu'il pourrait être au dernier moment écarté pour être envoyé à la place à la direction générale du Fonds monétaire international, à la suite des déboires judiciaires aux Etats-Unis de Dominique Strauss-Kahn.
"Mario Draghi n'est pas du tout intéressé par le poste au FMI", a déclaré lundi à l'AFP une porte-parole de la Banque d'Italie.
L'inculpation de "DSK" a en effet relancé plus tôt que prévu le débat sur sa succession à Washington. Or, la chancelière allemande Angela Merkel avait à l'origine, à en croire la presse de son pays, milité pour que Mario Draghi remplace le Français au FMI plutôt que Jean-Claude Trichet à la BCE.
Elle aurait eu des appréhensions à l'idée de nommer en pleine crise de la zone euro le représentant d'un pays très endetté, l'Italie, à la tête de l'institution chargée de veiller à la stabilité de la monnaie unique.
Il serait toutefois difficile à l'heure actuelle de tout bouleverser car les grands pays comme l'Allemagne et la France ont déjà publiquement adoubé le gouverneur de la Banque d'Italie pour prendre la tête de la BCE.
"Mario Draghi n'a pas de rival déclaré", souligne une source proche des discussions.
Sauf si un concurrent de dernière minute se profilait, les ministres des Finances de la zone euro, qui se retrouvent pour leur réunion mensuelle à Bruxelles, devraient donc dans la soirée se mettre d'accord pour soutenir sa candidature.
Sa nomination officielle devra encore attendre le prochain sommet fin juin des chefs d'Etat ou de gouvernement de l'Union européenne.
Le gouverneur de la banque centrale d'Italie aurait alors la lourde tâche de succéder en novembre au Français Jean-Claude Trichet, avec une crise de la dette qui risque de peser sur la zone euro pendant de longs mois encore. M. Trichet sera alors resté huit ans à la tête de l'institut monétaire de Francfort.
Le président français Nicolas Sarkozy a apporté son soutien à Mario Draghi le 26 avril au cours d'une rencontre à Rome avec le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, parlant d'"un très bon signal à tous les Italiens qui pourraient douter de leur place et de leur rôle dans l'Europe".
Mme Merkel s'est elle résignée à l'appuyer sans enthousiasme après avoir vu son candidat allemand, le patron de la Bundesbank Axel Weber, jeter l'éponge.
Si elle se confirme, la nomination de Mario Draghi posera par ricochet d'autres problèmes de nominations au sein du directoire de la BCE, son instance exécutive permanente de six personnes.
Avec son arrivée, l'Italie disposerait de deux représentants au sein du directoire puisqu'elle y compte déjà Bini Smaghi. Cela ferait trop pour de nombreux pays, à commencer par la France.
En novembre, il n'y aura en effet plus de Français au sein de l'instance lorsque Jean-Claude Trichet partira. Paris souhaiterait donc que M. Smaghi se retire pour lui laisser un siège libre.
Pour convaincre l'Italien de faire place nette - il ne peut être contraint à rien car il jouit d'une indépendance garantie par les statuts -, il faudrait lui trouver un poste de remplacement à la hauteur. Celui de gouverneur de la Banque d'Italie a été évoqué dans la presse, mais rien ne garantit pour le moment qu'il sera choisi par Rome.