
Le cycle des négociations de Doha sur la libéralisation des échanges entre les 153 membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est "une fois de plus au bord de l'échec", a estimé vendredi le directeur de l'OMC, Pascal Lamy, invitant les pays à trouver un compromis.
"Le cycle (de Doha) est, une fois de plus, au bord de l'échec", a déclaré M. Lamy devant les ambassadeurs réunis à Genève, se disant déçu qu'"aucun compromis n'ait été trouvé concernant les droits de douane" des produits industriels.
Car, comme il l'a fait valoir, c'est ce sujet qui bloque les discussions pour parvenir à un accord.
Les textes publiés la semaine passée par l'OMC faisant le point sur l'état des négociations ont aussi permis de constater les divergences entre les pays, ont relevé vendredi la plupart des ambassadeurs, réunis pour discuter des prochaines étapes de la négociation.
"Mon évaluation franche est que dans de bonnes conditions (...), un accord serait faisable, en gardant à l'esprit que +rien n'est convenu tant que tout n'a pas été accordé+", a jugé M. Lamy.
Toutefois, il a précisé que son jugement ne vaut que si les pays parviennent à trouver un accord sur les produits industriels "où l'ampleur des écarts entre les principaux acteurs bloque les progrès dans d'autres domaines et met sérieusement en doute la conclusion de l'Agenda de Doha cette année".
Le patron de l'OMC avait déjà souligné que les "différences" concernant le dossier des produits industriels "bloquent le processus et font peser de sérieux doutes sur la conclusion du cycle cette année".
Les principales économies de la planète se sont engagées fin janvier à faire tout leur possible pour conclure d'ici la fin de l'année les négociations devant ouvrir plus largement les marchés mondiaux, qui piétinent depuis leur lancement au Qatar en 2001.
Alors que 80% de l'accord, qui prévoit des baisses majeures des subventions agricoles, est déjà acquis selon M. Lamy, les oppositions entre les membres se sont cristallisées ces derniers mois sur le deuxième dossier phare de l'accord, les produits industriels.
Washington, considérant avoir déjà fait de larges concessions en matière agricole, souhaite que les pays émergents tels la Chine, l'Inde et le Brésil fassent plus d'efforts pour ouvrir leurs marchés à certains secteurs industriels, comme la chimie, l'électronique ou les machines-outils. Ce que les pays émergents refusent, défendant leur position de pays non encore développés.
Cherchant à débloquer la situation sur ces trois secteurs industriels, les Européens ont présenté vendredi une nouvelle formule technique -- "une solution de compromis" -- censée permettre de calculer les droits de douane de façon à satisfaire les pays développés et les pays en développement.
L'ambassadeur américain auprès de l'OMC, Michael Punke, a déclaré aux médias que les Etats-Unis allaient étudier la proposition européenne. Il a également indiqué que son pays "s'engageait à poursuivre toute option qui permettrait de sortir raisonnablement de l'impasse".
Il a par ailleurs souligné devant les autres ambassadeurs qu'il existe un "écart fondamental" dans les attentes des acteurs-clés pour les produits industriels, mais également vis-à-vis de l'agriculture et des services.
Pour sa part, l'ambassadeur chinois Yi Xiaozhun a déclaré que les "secteurs chimiques, électriques et électroniques, ainsi que de la machinerie industrielle représentaient uniquement les intérêts exportateurs des pays développés".
"Nous craignions que l'objectif de développement (du cycle de Doha) ait été marginalisé", a-t-il fait valoir.
Faute d'avoir défini les prochaines étapes de la négociation, les 153 membres de l'OMC doivent se retrouver le 31 mai pour faire le point sur la situation.