Les Etats-Unis n'ont aucune difficulté à emprunter malgré l'avertissement envoyé par l'agence de notation Standard & Poor's, ce qui donne à Washington l'impression d'avoir tout le temps nécessaire pour trouver un consensus sur son déficit budgétaire.
L'agence Standard and Poor's a fait passer lundi de "stable" à "négative" sa perspective sur la note de dette de l'Etat fédéral, face à l'incapacité de la classe politique à combler le trou béant des finances publiques.
La réaction des investisseurs s'est faite en deux temps. Le premier réflexe a d'abord fait baisser lundi matin la valeur des titres de dette du Trésor américain. Le taux d'intérêt des bons du Trésor à 10 ans est monté jusqu'à 3,447%, signe d'une demande plus faible. Mais dans l'après-midi de lundi puis toute la journée de mardi, les investisseurs en ont racheté, faisant descendre ce rendement à 3,372%.
"L'annonce de S&P sur la dette américaine n'a pas été le facteur le plus important à l'oeuvre sur les marchés lundi. Si cela avait été le cas, les bons du Trésor américain et le dollar auraient chuté. Or tous deux sont remontés", ont relevé les analystes de Ramsey King Securities.
Mardi, les prêteurs ont participé avec leur enthousiasme habituel aux émissions de dette: il y avait 147,9 milliards de dollars de demande pour des titres à quatre semaines, un montant qui suffirait à racheter 30% de la dette publique grecque d'un seul coup. Les acheteurs ont accepté un rendement nul ou négligeable, entre 0 et 0,05%.
"Ce n'est pas à proprement parler un soutien retentissant à la politique des Etats-Unis, mais cela implique que d'autres problèmes sont vus comme plus graves dans l'immédiat", comme ceux de la Grèce ou du Portugal, a commenté Nigel Gault, analyste d'IHS Global Insight.
Les marchés font preuve à l'égard des Etats-unis d'une patience dont ne bénéficient plus les pays européens les plus endettés.
Les bons du Trésor restent une référence, et les obligations à dix ans américaines rapportaient mercredi 3,35% l'an, bien moins qu'à l'époque où le budget fédéral était excédentaire (1998-2001). Il n'était alors jamais descendu sous 4,3%.
C'est aussi mieux que deux pays qui ont une perspective "stable" sur leur note "AAA", la France (3,58%) et le Royaume-Uni (3,52%).
Pour le prix Nobel d'économie Paul Krugman, l'avertissement de Standard & Poor's est un "non-événement" pour la planète financière.
"C'était censé être un avertissement", a-t-il estimé sur son blog mardi, mais "si cela avait eu de l'importance, on aurait dû assister à un bond des taux d'intérêt".
Le sang-froid du marché explique le peu d'empressement manifesté par Washington pour s'attaquer au problème de son déficit budgétaire.
"Il y a beaucoup de confiance dans la capacité de notre économie à croître, pour faire en sorte que nous puissions honorer nos engagements et nos obligations. Vous pouvez le voir dans le prix auquel nous empruntons chaque jour", a souligné mardi le secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, sur la chaîne Bloomberg TV.
Au Congrès, les débats s'éternisent sur le bon moyen de réduire le déficit, entre des démocrates qui veulent augmenter les impôts et des républicains qui veulent tailler dans les dépenses.