Rhodia bondit de plus de 48% à 31,27 euros pour s'aligner sur l'offre de Solvay. Le groupe de chimie belge a annoncé ce matin une offre d'achat amicale de 3,4 milliards d'euros, soit 31,60 euros par action, sur son homologue français. La proposition, qui représente une prime de 50% par rapport au cours de clôture de vendredi (21,065 euros), a été recommandée à l'unanimité par le conseil d'administration de Rhodia. "Le projet présenté aujourd'hui est une formidable opportunité pour Rhodia, pour ses équipes, et ses actionnaires", a commenté le PDG du groupe français, Jean-Pierre Clamadieu.
"Nous voyons la possibilité de doubler notre Rebitda (excédent brut d'exploitation récurrent) à presque 2 milliards d'euros et de créer une plateforme majeure de la chimie avec des positions mondiales sous la bannière de Solvay", a souligné de son côté, Christian Jourquin, directeur général du groupe belge.
Le nouvel ensemble réalisera un chiffre d'affaires de 12 milliards d'euros et un Rebitda de 1,9 milliard.
Selon Solvay, cette acquisition sera relutive sur le bénéfice net par action dès la première année. Au-delà des synergies de revenus, les synergies de coûts annuelles sont estimées à 250 millions d'euros à terme de trois ans.
Le géant belge, qui a vendu en septembre 2009 sa filiale pharmacie à Abbott pour 4,5 milliards d'euros, financera la transaction intégralement par sa trésorerie et sa structure financière restera conservatrice et solide.
Jean-Pierre Clamadieu deviendra membre du comité exécutif de Solvay avec le rôle de "Deputy Chief Executive Officer", soit numéro deux de la nouvelle entité. Le dirigeant est également pressenti pour succéder à Christian Jourquin, le PDG de Solvay, lors du départ de celui-ci.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Les points forts de la valeur
- Rhodia est désormais l'un des trois premiers acteurs mondiaux de la chimie de spécialités, plus rentable que la chimie de base. C'est le co-leader français avec Arkema.
- Le groupe a opéré un repositionnement en profondeur avec la cession des branches les moins rentables et la réorganisation de ses activités, au nombre de 11 depuis l'automne 2010, contre 6 auparavant.
- Le groupe a souvent fait preuve d'une bonne capacité à répercuter la hausse des matières premières et du dollar sur ses prix, préservant ainsi ses niveaux de rentabilité.
- Rhodia réalise 45% de ses ventes dans les pays émergents (notamment en Chine et au Brésil) et poursuit son développement dans ces zones au travers d'acquisitions ciblées comme au début de l'été 2010 avec le chinois Feixiang Chemicals. C'est un avantage comparatif face à ses concurrents.
- Rhodia a développé une activité de revente de crédit carbone (CER).
- 30% du chiffre d'affaires du groupe s'inscrit dans une démarche de développement durable.
- La direction est confiante dans les perspectives du groupe, le carnet de commandes ne reflétant pas de signe de ralentissement.
Les points faibles de la valeur
- La valeur a gagné 80% en 2010. Certains analystes estiment que les perspectives sont déjà intégrées dans les cours.
- Rhodia est fortement dépendant du prix des matières premières, et plus particulièrement de celui des dérivés du pétrole (benzène...). Il est également pénalisé en cas de repli du dollar.
- La visibilité sur l'activité de vente de crédits carbone est faible en raison des incertitudes sur l'allocation des quotas après la fin du protocole de Kyoto, en 2012.
- La structure bilancielle du groupe, avec notamment des capitaux propres négatifs, reste le principal point faible. La question de l'endettement financier est néanmoins en passe d'être résolue. La direction a renégocié la dette. Elle dépasse aujourd'hui de peu le milliard d'euros, soit le plus faible niveau depuis la création de Rhodia.
Comment suivre la valeur
- Le secteur de la chimie est particulièrement sensible à la conjoncture économique. Rhodia est une valeur cyclique et extrêmement volatile.
- Le groupe résiste mieux que ses concurrents à la crise. Son statut d'acteur incontournable du secteur pourrait être renforcé en sortie de crise.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Produits de base - Chimie
Les chimistes européens et américains demeurent prudents. Ils sont conscients qu'ils traversent actuellement une phase de croissance liée à la fin du déstockage chez leurs clients industriels. Le syndicat européen du secteur, le Cefic, qui estime que la croissance de la production devrait atteindre 2% en 2011, souligne que la reprise sur le marché européen demeure fragile. En France, l'Union des industries chimiques (UIC) considère que la croissance de la production ne dépassera pas 2,6% l'année prochaine.