L'association UFC-Que choisir a dénoncé mardi le "dérapage tarifaire" des pièces détachées de carrosserie en France dont le prix a bondi de 26% en cinq ans, exigeant la fin du monopole des constructeurs automobiles sur la fabrication et la vente de ces éléments.
Relevant que "la France bloque la réglementation européenne libéralisant le marché des pièces détachées automobiles", l'association a dénoncé la "double peine" infligée aux consommateurs du fait de ce monopole, comparant leur situation à celle des automobilistes d'autres pays.
Elle a réclamé un dénouement heureux à la "saga réglementaire" européenne: une directive sur la protection juridique des dessins et modèles adoptée par le Parlement européen en septembre 2004 attend toujours son examen par le conseil des ministres européens.
Dans une enquête présentée mardi et menée en France et dans plusieurs pays ayant libéralisé ce marché (Allemagne, Belgique et Espagne), l'association a estimé que les constructeurs "gonflent le prix des pièces" tandis que le consommateur français est dans l'impossibilité d'acheter des pièces "alternatives", c'est-à-dire fabriquées et vendues par des entreprises indépendantes du constructeur.
"Tout contrevenant est considéré comme vendant de la contrefaçon", a souligné Alain Bazot, président d'UFC-Que choisir lors d'une conférence de presse, relevant la "tolérance zéro des constructeurs français".
Cette enquête a porté sur quatorze pièces de carrosserie (capot de moteur, phares, ailes, hayon, etc.) pour plusieurs modèles de véhicules de cinq constructeurs (Renault, Peugeot, Citroën, Ford et Volkswagen).
"Quel que soit le pays ou le constructeur envisagé, il existe un important écart de prix entre les pièces constructeurs et les pièces alternatives considérées", a relevé l'association, constatant -35,5% en moyenne en Allemagne par rapport au prix constructeur, -33,5% en Belgique et -33,9% en Espagne.
Chez Peugeot en Allemagne, les prix sont inférieurs de 42% en moyenne dans un réseau indépendant, avec des différences marquées selon les modèles: -52,3% pour une 206 (1998-2009), -54,4% pour une 307 (2001-2005), -29,6% pour une 207. Pour la même marque, l'écart moyen est de -34,1% en Belgique et de -31,9% en Espagne.
Pour Renault, l'écart moyen est de -30,6% en Allemagne, de -32,4% en Belgique et de -40,6% en Espagne.
Les écarts sont importants même pour les pièces de modèles très vendus comme la Peugeot 206 ou la Renault Clio "où il pourrait y avoir des économies d'échelle" mais "le constructeur se construit une marge avec les véhicules les plus vendus", a relevé M. Bazot.
Selon lui, la vente des pièces détachées représente 13,2% du chiffre d'affaires de Renault, mais 31% de sa rentabilité.
"A partir du moment où un modèle marche bien, le prix des pièces détachées augmente", a souligné Edouard Barreiro, auteur de l'enquête, notant que les prix catalogues des constructeurs varient seulement de 2,4% en moyenne entre zone libéralisée (complétée récemment par Royaume-Uni, Pologne et Grèce) et zone non libéralisée.
L'automobile mobilise 12% du budget des ménages français (132 milliards d'euros), dont 40% pour pièces détachées et réparations, selon l'association.
Outre ces coûts directs, le consommateur est frappé indirectement par le niveau des prix et leur inflation au travers de sa cotisation d'assurance automobile car ces coûts sont répercutés dans les primes. Selon l'organisme Sécurité réparation automobile (SRA), les pièces détachées comptent pour 47,3% du coût total de la réparation.
Une étude en France de la Fédération des syndicats de la distribution automobile (FEDA) montre que les pièces ont augmenté jusqu'à près de 350% (passage de roue pour Citroën C5) entre 2008 et 2009.