Le Portugal a réussi mercredi à lever un milliard d'euros d'obligations à moyen terme, lors d'une émission marquée par des taux d'intérêt en hausse et une demande soutenue, malgré les inquiétudes croissantes exprimées ces derniers jours sur la solvabilité du pays.
Le taux d'intérêt moyen exigé par les investisseurs pour ces obligations à deux ans et demi (échéance septembre 2013) a atteint 5,993%, nettement supérieur aux 4,086% obtenus en septembre 2010 sur la même ligne d'obligations.
Le Portugal a néanmoins réussi à placer le montant maximal prévu. La demande a été 1,6 fois supérieure à l'offre, a précisé l'Institut de gestion du crédit public (IGCP).
Cette émission était très attendue en raison du regain de tension sur le marché de la dette portugaise. Depuis plus d'un mois, les taux portugais à dix ans évoluent à plus de 7%, un niveau jugé intenable par les économistes qui estiment que le pays sera contraint, à brève échéance, de faire appel à un plan de sauvetage financier, à l'image de la Grèce et de l'Irlande.
Mardi, ces taux avaient même atteint les 7,541%, à des niveaux records depuis la création de la zone euro.
Cette poussée de fièvre intervient alors que les pays européens peinent à se mettre d'accord sur le futur mécanisme européen de soutien financier qui doit être annoncé lors de leur prochain sommet des 24 et 25 mars.
La semaine dernière, l'agence de notation Standard and Poor's avait averti qu'elle pourrait abaisser la note souveraine du Portugal, en fonction des décisions prises à Bruxelles, s'inquiétant notamment de l'éventualité d'une restructuration de sa dette.
Jusqu'à présent, les autorités portugaises ont exclu de recourir à l'aide extérieure, affirmant être capables de réduire les déficits du pays grâce à un sévère plan d'austérité.
Lundi, le Premier ministre José Socrates avait une nouvelle fois exclu toute intervention extérieure, estimant qu'elle signifierait une perte de "prestige" et de "dignité" pour son pays.
Selon Joao Cantiga Esteves, professeur à l'Institut supérieur d'économie (ISEG), "le gouvernement tente de garder la tête hors de l'eau encore quelques jours dans l'attente des décisions de l'Europe".
Le Portugal, qui s'est engagé à ramener son déficit public à 4,6% du PIB fin 2011, espère éviter un recours à un plan d'aide impliquant une intervention du Fonds monétaire international (FMI) si les dirigeants européens parviennent à apporter une solution durable à la crise de la dette.
Lisbonne prône l'élargissement et surtout la flexibilisation du futur mécanisme d'aide qui lui permettrait de racheter directement la dette des pays les plus fragiles, allégeant ainsi les pressions des marchés.
D'ici la fin juin, le Portugal doit faire face à d'importantes échéances, devant rembourser 3,8 milliards en bons du trésor et plus de 9 milliards en obligations, selon les données de l'IGCP.
Mercredi, le Portugal a procédé à un rachat anticipé de 14 millions d'euros de dette due en juin, mais a renoncé au rachat d'obligations dues en avril initialement prévu.
Depuis le 16 février, l'IGCP a racheté 339 millions de dette avant terme sur plus de 9 milliards dus.
Selon les analystes, la faiblesse des montants en cause est un bon signe et montre que les investisseurs préfèrent attendre un remboursement à taux plein à échéance, ne croyant pas à un défaut du Portugal avant juin.
"A court terme, aucun investisseur ne craint un défaut de paiement", affirme Filipe Silva, stratégiste obligataire à la banque Carregosa, qui estime que "le problème n'est pas la capacité du Portugal à régler ses dettes à court terme, mais le niveau insoutenable des taux sur le marché secondaire".