La justice n'enquêtera pas sur la nomination controversée de l'ancien secrétaire général adjoint à l'Elysée, François Pérol, à la tête du groupe Banque populaire-Caisse d'Epargne (BPCE), a décidé jeudi la cour d'Appel de Paris.
La décision peut encore être contestée devant la cour de Cassation. Les syndicats Sud et CGT du groupe, qui avaient porté plainte pour "prise illégale d'intérêts" à la suite de cette nomination ont cinq jours, jusqu'au 8 mars, pour saisir la Cour de cassation.
Depuis sa nomination en février 2009 à la tête de la Caisse d'Epargne pour mettre en place la fusion avec la Banque populaire et donner naissance au deuxième groupe bancaire français, M. Pérol, 47 ans, est la cible d'une polémique et de multiples plaintes.
Les syndicats, comme les partis d'opposition, estiment que, responsable à l'Elysée des dossiers économiques et industriels de 2007 à 2009, il a, à ce titre, joué un rôle essentiel dans la fusion.
La cour d'appel a rejeté cet argument. "Les faits dénoncés n'ont pas été commis", selon l'arrêt consulté par l'AFP. Et aucun des "actes" de M. Pérol comme conseiller de l'Elysée "ne permet de caractériser l'infraction de prise illégale d'interêt".
Car, selon les magistrats, "une simple influence, même politique, ne permet pas de caractériser les délits" dont était accusé M. Pérol.
En outre les "deux avis" donnés par M. Pérol ont eu "pour seuls destinataires, le président de la République et le secrétaire général de la présidence" Claude Guéant (à l'époque, ndlr), qui ne sont pas des "autorités juridiquement compétentes pour l'opération de fusion et son financement".
M. Pérol "n'a pas et ne pouvait pas intervenir dans le processus formalisé de prise de décisions administratives" sur la fusion, conclut la cour d'appel.
En revanche, la juridiction admet que "la qualité d'agent public de François Pérol", qui avait démissionné le 11 mars 2009 de son corps d'origine, l'inspection des finances, après sa nomination à la BPCE, "n'est pas contestable".
En tant que haut fonctionnaire, la nomination de M. Pérol à la BPCE aurait dû être examinée par la commission de déontologie de la fonction publique. Mise en place par une loi de février 2007, cette commission peut opposer un veto au "pantouflage", c'est-à dire le passage au secteur privé d'un fonctionnaire.
Or, dans le cas de M. Pérol, la commission, contrairement à ce qu'avait affirmé Nicolas Sarkozy, n'avait pas été saisie.
"Déçu" par la décision de la cour d'appel, l'avocat de la CGT, Jérôme Karsenti, a annoncé sa décision de "faire un pourvoi" en cassation.
"Il y a matière à donner suite à cette affaire", a réagi de son côté Patrick Saurin (Sud-BPCE), selon lequel "tout le monde sait que Pérol est dans ce dossier".
"Il connaît même le dossier depuis très longtemps à la fois dans le public", comme ancien directeur de cabinet adjoint de Francis Mer puis Nicolas Sarkozy à Bercy (2002-2005) puis associé-gérant de la banque Rothschild (2005-2007) puis à l'Elysée (2007-2009).
Dans un premier temps, le parquet de Paris avait décidé de classer les plaintes, estimant lui aussi que le rôle de M. Pérol était d'informer le président de la République, mais "n'était pas une autorité publique compétente pour intervenir dans le dossier".
Saisi de l'affaire par une constitution de partie civile, le juge d'instruction Roger Le Loire avait en revanche estimé que les conditions pour l'ouverture d'une information judiciaire étaient réunies.