
Les groupes de distribution français, qui se sont essentiellement construits autour de grandes surfaces pensées pour la consommation de masse, multiplient désormais les petits magasins de proximité urbains modernes, dans lesquels ils voient un nouvel eldorado.
La liste des enseignes de proximité - appellation à la mode pour désigner supérettes et épiceries, c'est-à-dire des commerces alimentaires de 100 à 400 mètres carrés - ne cesse de s'enrichir, s'adressant souvent à une clientèle pressée, qui fait des courses de dépannage et ne veut plus s'éterniser dans les hypermarchés.
"Ces nouveaux concepts sont séduisants au plan marketing, ils modernisent la proximité, ils sont compétitifs en termes de tarification, parce qu'ils s'appuient sur une logistique, un merchandising, une centrale d'achat", explique Philippe Moati, directeur de recherche au Crédoc qui insiste sur "l'offensive généralisée (car) tout le monde pense que l'enjeu se trouve ici".
"L'offre est en train de gagner en qualité et progresse sur le plan quantitatif", une évolution qui devrait "faire des victimes" chez "les plus faibles", dans un marché encore caractérisé par de nombreuses épiceries de quartier indépendantes.
"Tous les groupes de distribution se ruent dessus. C'est devenu le nouvel eldorado, peut-être de manière un peu excessive", ajoute M. Moati,"la priorité des distributeurs est de réinventer la proximité" et, en même temps de "relancer les grandes surfaces de périphérie".
Monoprix a été précurseur avec ses enseignes Monop et Daily Monop, aux horaires élargis et une large offre de "snacking" (sandwichs, salades...).
Carrefour, qui compte plus de 3.000 magasins de proximité, transforme ses Shopi et 8 à Huit en Carrefour City (en ville) et Carrefour Contact (à la campagne), avec l'objectif d'en avoir 800 à la fin de l'année. Il teste aussi Carrefour City Café et Carrefour Express.
Casino, qui compte environ 7.000 magasins de proximité urbains ou ruraux (Petit Casino, Vival, Spar), va à lancer à Marseille un magasin pilote de proximité urbain, qui devrait à terme remplacer l'actuel Petit Casino, "avec un doublement de l'assortiment, une baisse des tarifs et un fort accent sur les services", selon le patron de Casino Proximité, Jean-Pierre Lanzetti.
Il devrait en partie s'inspirer de Chez Jean, créé il y a deux ans, qui propose de la presse en partenariat avec Relay, de "la petite restauration", de l'épicerie et un service de wi-fi, 7 jours sur 7.
Face à ceux, nombreux, qui jouent la carte de la rapidité, il mise sur "la convivialité, un temps qui s'arrête".
En ville, "un commerce de proximité tous les 3-400 mètres fait sens", estime-t-il.
Même Auchan, spécialiste des grands hypermarchés, vient d'ouvrir son premier magasin A2Pas à Paris.
Système U, qui comptait, fin 2010, quelque 150 magasin de proximité U Express et 368 Utile, vise 400 magasins supplémentaires en cinq ans, notamment en centre-ville, "un des enjeux de demain", selon Serge Papin, président du groupement.
Intermarché a ouvert son troisième Intermarché Express récemment, à Lille. "Quand on a créé Leclerc Express" (47 magasins), "on a cédé à une sorte de fébrilité d'effet de mode", estime de son côté Michel-Edouard Leclerc, faisant valoir que compte tenu des implantations géographiques des hypers du groupement, les clients ont généralement plus vite fait d'y aller en voiture que de se rendre en centre-ville.