Le chômage est reparti à la hausse en Espagne, atteignant fin 2010 un taux de 20,33%, son plus haut niveau depuis 13 ans et un record parmi les pays industrialisés, dépassant largement l'objectif fixé par le gouvernement socialiste.
Depuis mi-2007, le taux de chômage n'aura finalement baissé que sur un seul trimestre, le troisième de 2010, repassant brièvement sous la barre symbolique des 20% (19,79%) qu'il avait franchie en début d'année.
A fin décembre, il est supérieur de près d'un point par rapport à l'objectif gouvernemental de 19,4% et retrouve un niveau jamais atteint depuis le deuxième trimestre 1997 (20,72%). Dans certaines régions il frôle les 30%, comme en Andalousie (28,35%) et aux Canaries (28,96%).
Le nombre de sans emploi atteint 4,697 millions, soit 370.100 de plus qu'en 2009, selon l'Ine. Sur ce chiffre, près de la moitié des personnes (2,049 millions) sont au chômage depuis plus d'un an.
Deux secteurs ont été particulièrement touchés, celui des services, qui a perdu 115.800 emplois sur le trimestre, et la construction, secteur-phare de l'Espagne pendant les années de croissance mais sinistré depuis la crise, qui en a perdu 95.600.
L'irrésistible ascension du chômage n'a quasiment pas cessé depuis l'été 2007, quand il avait atteint un plancher historique à 7,95%.
Frappée par la crise et l'éclatement de sa bulle immobilière, l'Espagne est entrée en récession fin 2008 et n'en sort aujourd'hui que timidement, avec ainsi une croissance nulle au troisième trimestre.
Son taux de chômage est désormais deux fois supérieur à la moyenne dans l'Union européenne et dans l'ensemble de l'OCDE.
Le gouvernement, qui s'était déjà montré trop optimiste pour 2009 où il prévoyait 17,9% (le taux avait finalement été de 18,83%), a récemment noirci sa prévision pour 2011, tablant désormais sur 19,3%, contre 18,9% auparavant. Il attend 17,5% en 2012 et 16,2% en 2013.
Deux chiffres restent inquiétants: le chômage des moins de 25 ans, qui dépasse les 40%, et le nombre de foyers dont aucun membre n'a un emploi, qui atteint 1,3 million.
Et le problème est que la croissance n'est toujours pas au rendez-vous.
"L'activité ne reprend pas", a souligné à la radio un reponsable du syndicat UGT, Toni Ferrer.
Cette semaine le Fonds monétaire international (FMI) a revu à la baisse ses prévisions, attendant 0,6% en 2011 (contre 0,7% avant) et 1,5% en 2012 (contre 1,8%).
Si le gouvernement espagnol est plus optimiste, prévoyant 1,3% en 2011, après -0,3% en 2010 (les chiffres officiels seront connus le 11 février), il reconnaît que ce n'est pas suffisant.
"L'Espagne a toujours besoin de croître de 2% pour créer de l'emploi", admettait récemment le ministre du Travail Valeriano Gomez, prédisant que la création d'emplois reprendrait au second semestre mais prévenant qu'il faudrait "trois ou quatre ans pour revenir à un taux d'avant la crise".
"Talon d'Achille de l'Espagne", selon le FMI, le marché du travail a fait l'objet cet été d'une vaste réforme destinée à le rendre plus fluide, en termes de contrats, d'horaires et de licenciements, et fortement contestée par les syndicats.
Une nouvelle réforme, pour repousser l'âge du départ en retraite à 67 ans, doit être approuvée vendredi en Conseil des ministres.
Le taux élevé de chômage "est une très mauvaise nouvelle, et le hasard veut qu'elle survienne précisément le même jour où un accord a été trouvé sur les retraites: ces deux questions sont vraiment liées", a réagi à la radio le responsable à Madrid de l'organisation patronale CEOE, Alejandro Couceiro.