Le mécontentement des Grecs face à la thérapie de choc administrée à leur pays doit s'exprimer mercredi dans une grève générale, la septième de 2010, s'inscrivant dans le cadre d'une mobilisation européenne qui doit paralyser les transports en Grèce et perturber le secteur public.
La Grèce était privée mercredi de transports aériens, maritimes et ferroviaires, et son activité tournait au ralenti, dans le cadre d'une grève générale de 24 heures contre la rigueur et deux réformes du marché du travail et des entreprises publiques votées dans la nuit.
Pour la troisième journée consécutive, après des premiers débrayages dans les transports, Athènes était livrée à de gigantesques embouteillages par des arrêts de travail des métros, bus et trams, et dans l'attente d'une manifestation dans le centre en fin de matinée.
Avec un espace aérien fermé par le ralliement à la grève des contrôleurs aériens, et tous les bateaux cloués au quai par celui des marins, le pays était aussi privé de toute information par une grève de 24 heures des journalistes.
La grève affectait aussi les écoles, hôpitaux, tribunaux, banques et grandes entreprises publiques, notamment électricité et poste. Une série de syndicats, dont ceux des pharmaciens et ingénieurs civils, ont appelé leurs adhérents à suivre le mot d'ordre.
Annoncée depuis octobre par la centrale syndicale GSEE qui revendique un million d'adhérents, la mobilisation en Grèce a fait tâche d'huile au fil du lancement par le gouvernement socialiste de nouvelles mesures d'austérité et de réformes impopulaires, sous la pression de l'Union européenne (UE) et du Fonds monétaire international (FMI).
Le syndicat de la fonction publique, Adedy (350.000 adhérents), s'est joint au mouvement après la présentation du budget 2011. Ce projet durcit la rigueur administrée au pays depuis le printemps dans l'objectif de ramener son déficit public à 7,4% du PIB, en dépit d'une récession qui s'aggrave (baisse de 4,6% du PIB au 3e trimestre).
Le climat social a viré à l'aigre la semaine dernière avec le coup d'envoi de deux réformes libéralisant le marché du travail et réduisant les salaires dans les entreprises d'intérêt public, vouées à une restructuration pour les plus déficitaires, notamment les chemins de fer.
Ces mesures, défendues par le Premier ministre Georges Papandréou au nom de la sauvegarde de l'emploi, sont exigées par l'UE et le FMI en vue du déblocage, normalement en février, de la quatrième tranche d'un montant de 15 milliards d'euros du prêt de 110 milliards consenti au pays en mai.
La GSEE et Adedy ont riposté en dénonçant une "démolition radicale des relations de travail et des droits des travailleurs" et en annonçant un arrêt de travail de trois heures mardi à la mi-journée.
Une manifestation est alors prévue devant le parlement, où les deux réformes doivent être votées en procédure d'urgence, tandis que le syndicat des banques doit entamer une grève de 48 heures et tous les transports en commun d'Athènes être paralysés par un débrayage de 24 heures, reconductible jeudi.
Les contrôleurs aériens et marins se sont ralliés au mot d'ordre de mercredi, ce qui doit conduire à la fermeture de l'espace aérien pour 24 heures et à la suspension de toutes les liaisons avec les îles grecques.
Une grève des journalistes doit aussi priver le pays de toute information pendant 24 heures, tandis qu'écoles, hôpitaux et entreprises publiques tourneront au ralenti, et que les pharmacies doivent rester fermées.
"Au point où nous en sommes, on devrait carrément mettre la clé sous la porte, il n'y a plus de limites à ce qui nous est imposé", s'est indigné auprès de l'AFP le président du syndicat du métro d'Athènes, Antonis Stamatopoulos.
"Trop c'est trop, cette fois je ferai grève et j'irai manifester, tant pis si je suis licencié", lance pour sa part Nikos, employé dans une grande banque privée, rompant avec des mois d'attentisme résigné.
Avec "l'aggravation des difficultés financières" au quotidien, "la tension sociale monte", relève Thomas Gerakis, directeur de l'institut de sondage Marc.
La protestation contre la rigueur a dominé les manifestations, émaillées d'échauffourées et de casse, commémorant le 6 décembre la mort d'un adolescent tué par un policier en 2008 à Athènes.
Depuis, le patron du FMI Dominique Strauss-Kahn et le Commissaire européen aux affaires économiques Olli Rehn se sont succédé à Athènes pour presser le gouvernement de poursuivre l'assainissement financier du pays en libéralisant tous azimuts et en serrant les cordons de la bourse de l'Etat.
Le 15 décembre est une date de mobilisation initialement choisie par la Confédération européenne des syndicats (CES) pour protester contre la rigueur imposée dans plusieurs pays de l'UE et peser sur le Conseil européen prévu jeudi.