Pour Christophe Barret, analyste pétrole chez Crédit Agricole CIB, la hausse des prix du baril correspond à des factuels ponctuels et ne présage pas d’une tension durale sur les prix à court et moyen terme.
Boursereflex : Comment expliquez-vous la forte hausse des prix du pétrole ?
Christophe Barret : Il s’agit de la conjonction de plusieurs facteurs. Tout d’abord, nous connaissons actuellement une forte vague de froid qui entraîne une demande importante de fuel non prévue. C’est le cas en France, en Angleterre, en Allemagne ainsi qu’en Russie. Cette demande intervient dans un marché qui avait été rééquilibré par les évènements d’octobre en France (les grèves ont laissé les marchés européens avec un déficit de produit assez important).
Boursereflex : Les demandes américaine et chinoise, généralement plus gourmandes, ont-elles favorisé cet engouement ?
Christophe Barret : Aux Etats-Unis, la progression de la demande reste forte mais elle est cependant bien inférieure à avant la crise. Il n’y a donc pas d’explosion de la demande américaine. La demande asiatique est, quant à elle, toujours très importante. Apparemment, en Chine un objectif d’amélioration de l’efficacité énergétique est mis en œuvre. Les provinces ont donc coupé la distribution d’électricité à certaines entreprises, qui consommaient beaucoup et qui se sont rabattues sur des générateurs fonctionnant au diesel. La demande de diesel a donc beaucoup augmenté en Chine.
Boursereflex : Une forte demande chinoise peut-elle être tenable à long terme ?
Christophe Barret : A cause de la crise, nous avons un excès des capacités de raffinage en Europe et dans le monde. De nouvelles raffineries ont vu le jour en 2009. De plus l’opep a des capacités de production excédentaires avec 6 millions de baril jour. Il n’y a pas de tension sur le marché du pétrole.
Boursereflex : Quelles sont vos perspectives concernant le prix du baril en 2011 ?
Christophe Barret : Nos prévisions sont de l’ordre de 79 dollars le baril pour 2011. Le premier trimestre restera vraisemblablement encore un peu tendu mais au deuxième trimestre les stocks devraient être reconstitués.
Boursereflex : Et à plus long terme ?
Christophe Barret : Nous devrions connaître un excès de production jusqu’en 2013 avec un marché toujours entre les mains de l’OPEP. Les prix pourraient augmenter après cette période. Ce sont les pays de l’OPEP qui gèrent l’évolution du prix du pétrole. Ils ont tout intérêt à conserver les prix relativement élevés dans les 80 euros, prix qui reste compatible avec la demande.
Propos recueillis par Lucie Morlot.