
Le liquidateur de l'affaire Madoff, qui cherche à récupérer les fonds perdus par les victimes de cette gigantesque escroquerie, a annoncé jeudi qu'il réclamait 6,4 milliards de dollars à la banque américaine JPMorgan Chase, principale banque du fonds de Bernard Madoff.
Dans un communiqué, le liquidateur Irving Picard précise qu'il a porté plainte devant un tribunal des faillites à New York (est). Il cherche à recouvrer près d'un milliard de dollars en frais de gestion et bénéfices ainsi que 5,4 milliards de dommages et intérêts de la part de JPMorgan Chase.
"Toutes les sommes recouvrées seront placées dans le fonds des clients (de Madoff) et seront distribuées, au prorata, aux clients faisant preuve de revendications valides", précise le communiqué.
"JPMorgan s'est montré volontairement aveugle devant la fraude, même après avoir eu connaissance des nombreux signaux d'alerte entourant Madoff", a commenté David Sheehan, conseiller juridique du liquidateur.
"Si beaucoup d'institutions financières ont permis à Bernard Madoff de mener à bien sa fraude, JPMorgan Chase a été au centre de cette escroquerie et entièrement complice", ajoute-t-il.
"JPMorgan Chase a été le principal banquier de BLMIS pendant plus de 20 ans, et avait pour responsabilité de connaître les activités de ses clients, dans ce cas précis d'un très gros client", argumente-t-il.
M. Madoff "n'aurait pas été capable de commettre sa fraude pyramidale sans cette banque qui doit en payer le prix", affirme M. Sheenan.
La plainte établit que JPMorgan Chase avait des suspicions claires et documentées sur la légitimité des opérations de BLMIS mais qu'au lieu d'agir, la banque a continué à collecter des commissions et des bénéfices découlant de l'escroquerie.
"JPMorgan Chase a admis que, pendant les mois avant l'arrestation de M. Madoff, les rendements de BLMIS étaient trop bons, particulièrement pendant les périodes de baisse des marchés", remarque Deborah Renner, une représentante du liquidateur.
JPMorgan a vigoureusement protesté contre ces allégations "irresponsables" et "sans fondement".
La plainte du liquidateur "déforme de manière flagrante à la fois les faits et la loi dans le but d'attirer les gros titres", a affirmé la banque dans un communiqué. "Contrairement aux allégations du liquidateur, JPMorgan n'avait pas connaissance de la fraude orchestrée par Bernard Madoff et ne l'a pas aidé à la commettre".
"En tant que fournisseur de services bancaires commerciaux ordinaires à la firme de courtage de M. Madoff, JPMorgan a totalement respecté la loi", ajoute-t-elle.
La banque a précisé avoir elle-même perdu de l'argent à cause du scandale Madoff, par l'intermédiaire de sociétés etrangères affiliées.
Ces accusations sont "particulièrement décevantes à la lumière des efforts significatifs faits par JPMorgan pour aider le liquidateur dans l'enquête sur la fraude", poursuit la banque, qui promet de se "défendre vigoureusement".
La semaine dernière, M. Picard avait annoncé qu'il réclamait deux milliards de dollars à la banque suisse UBS, faisant valoir que "Madoff n'a pas agi seul pour commettre la plus grande fraude financière de l'histoire".
Bernard Madoff, 72 ans, a été condamné en 2009 à 150 ans de prison pour cette escroquerie, estimée entre 23 et plus de 65 milliards de dollars, selon que l'on compte avec ou sans les intérêts.