Le chômage en Allemagne n'en finit pas de baisser: à Freising en Bavière, cela se traduit par le plein emploi, mais à l'autre bout du pays, à Neubrandenburg en ex-RDA, le marché du travail reste embourbé.
Avec 13,8% en novembre, selon les chiffres publiés mardi, l'arrondissement de Neubrandenburg, à deux heures au nord de Berlin, affiche un des taux les plus élevés d'un pays qui pointe dorénavant à 7%.
Mais Heiko Mirass, directeur de l'Agence pour l'emploi locale, assure: "le temps du chômage de masse (plus de 20%) est derrière nous".
Mais si le nombre de chômeurs baisse dans cette ville de 70.000 habitants, où les vestiges médiévaux le disputent aux barres d'immeubles géantes, c'est principalement parce qu'ils atteignent l'âge de la retraite, ou qu'ils émigrent. En 20 ans, Neubrandenburg a perdu un tiers de sa population.
Le "miracle de l'emploi" évoqué avec délectation par l'équipe d'Angela Merkel ne peut pas grand chose pour les victimes de l'effondrement de l'industrie de l'ex-RDA: dans l'arrondissement, plus d'un tiers des sans-emploi ont plus de 50 ans, plus d'un quart sont des chômeurs de longue durée.
"Nous assistons à une certaine fossilisation du chômage", reconnaît M. Mirass.
Son homologue de Freising (sud), à la périphérie de Munich, a d'autres préoccupations: trouver des candidats à l'embauche.
Le taux de chômage était ici de 2,3% en novembre, le plus bas du pays. Et c'est comme ça "depuis plus de dix ans", s'enorgueillit Karin Weber. C'est le fait d'une "constellation très particulière": la proximité de l'aéroport, de Munich ou encore d'Ingolstadt, fief du constructeur automobile Audi, sans compter un tissu très serré de PME.
Dans ce paysage de campagne semé de villes proprettes, la majorité des sans-emploi sont des chômeurs "de fluctuation", explique Mme Weber: le mois dernier, 1.500 personnes se sont inscrites au chômage, mais 1.800 ont trouvé un emploi.
Le marché du travail est reparti de plus belle après la crise: les salariés jonglent entre les postes, avec de brefs intermèdes chômés.
"Mais cela ne veut pas dire que nous n'avons rien à faire", explique Michael Schmidt, directeur des opérations de l'Agence. Par exemple, chercher des solutions pour "les plus âgés, les personnes avec un handicap", et les aiguiller vers les postes vacants. Il y en a actuellement 55% de plus que fin 2009. Pour Mme Weber, "nous pouvons descendre encore un peu plus bas" que 2,3%.
A Neubrandenburg aussi l'Agence pour l'emploi fait son possible pour intégrer les plus âgés. Dans un centre de formation, devant un tableau noir, Elke Rödel remplit son cahier d'écolière.
A 49 ans, elle veut décrocher une qualification d'aide-soignante pour personnes âgées. "C'est difficile de retourner à l'école", souffle-t-elle, avant de confier son "rêve": "un contrat à durée indéterminée."
Toujours à Neubrandenburg, Jens Junghänel a plus de chance de profiter de la reprise qu'elle. Blouse bleue, air concentré, le trentenaire aligne des rangées de chiffres et de lettres sur son ordinateur. Au chômage depuis mars, il suit maintenant une formation pour programmer des machines-outils.
"Je travaille depuis neuf ans, avec des interruptions. Mais toujours à l'Ouest. Ce que je veux, c'est bosser ici", explique-t-il.
Dans l'arrondissement, le taux de chômage des jeunes recule sans cesse, et atteint quelque 10%: "un chiffre qui ferait rêver en Espagne", se réjouit M. Mirass.
A Freising, l'objectif de Mme Weber est un taux de chômage des jeunes à zéro.
Même ici pourtant, "il y a des gens dans le besoin", explique sous couvert d'anonymat une bénévole qui organise chaque semaine une distribution de nourriture à Moosbach, à quelques kilomètres de Freising. Mères célibataires, personnes qui travaillent mais gagnent trop peu pour en vivre décemment: "Ici c'est à peu de choses près comme partout ailleurs", dit-elle.