"Le positif est de retour", assure la publicité de Carrefour. En sera-t-il de même des clients? Pour stopper la baisse de fréquentation des hypermarchés, le groupe va investir pas moins de 1,5 milliard d'euros en deux ans dans la modernisation de 500 magasins européens.
Près de la moitié de ces hypers (245) passera sous la bannière Carrefour Planet, un nouveau concept exploité dans cinq magasins pilotes en France, en Espagne et en Belgique.
Les 255 autres hypers, trop petits pour le modèle Planet, s'en inspireront et seront "profondément rénovés".
La transformation des magasins en France, Espagne, Belgique, Italie et Grèce commencera au deuxième trimestre 2011 et sera terminé "début 2013", a détaillé le directeur général Lars Olofsson jeudi à Lyon, lors d'une journée consacrée aux analystes.
"Je ne montre à personne exactement ce qu'on va faire, mais vous avez un bon aperçu", a-t-il ajouté après une visite des hyper pilotes d'Ecully et Vénissieux (banlieue lyonnaise), ne voulant pas tout dévoiler à la concurrence. Le groupe, inventeur de l'hypermarché, tire ainsi un trait sur le concept de "tout sous le même toit" avec des coupes franches dans des rayons peu porteurs tout en en développant d'autres pour devenir un "multispécialiste", avec l'ambition de tenir tête à des leaders comme Picard (surgelé), Séphora (beauté), H & M (textile) ou Ikea (vaisselle, ustensiles, linge de maison...).
Pour que hyper ne soit plus synonyme de corvée, il propose conseils, services (garderie d'enfants, retouches, coupe de cheveux à sec...), mais aussi des techniques pour gagner du temps: circuit court dans la partie alimentaire, scanner soi-même les articles pour gagner du temps...
Davantage d'effectifs sont dédiés à l'assistance et au conseil, tandis qu'en back-office on améliore la productivité. Au total, "il y aura moins" de personnel, a concédé M. Olofsson, sans communiquer de chiffre.
Pour donner envie aux clients de revenir, un espace "événementiel" de 2.000 mètres carrés change tous les 10 jours.
La circulation en magasin est facilitée par des allées élargies et les linéaires sont moins hauts, donnant aux clients interrogés par l'AFP l'impression d'un hyper plus grand, malgré une réfection à surface constante.
"C'est très beau, il y a plus d'espace, mais je me sens un peu perdue", déclarait Sandrine Demarcq, 39 ans, au lendemain de l'inauguration d'Ecully. "Ca fait plus haut de gamme qu'avant".
Reste à savoir si après la (re)découverte, les clients auront envie de revenir régulièrement.
Oui, répond M. Olofsson: les cinq magasins pilotes ont affiché "une croissance de la fréquentation à deux chiffres", s'est-t-il félicité.
Carrefour mise gros avec le chantier de la "réinvention" de l'hyper lancé il y a un peu plus d'un an: il s'attend à une croissance additionnelle du chiffre d'affaires de 18% en moyenne annuelle pour la période 2010-2015.
Le groupe dans son ensemble prévoit de réaliser des ventes (hors essence) de 105 milliards d'euros en 2013 et 120 milliards en 2015 contre 79 milliards en 2009. De même, il table sur un bénéfice d'exploitation avant éléments non courants de 5,2 milliards d'euros en 2013 et 6,4 milliards d'euros en 2015.
L'hypermarché, qui avait révolutionné la distribution, avait fini par concentrer trop d'inconvénients aux yeux du consommateur.
Trop loin, à la périphérie des villes, alors que les Français se seraient habitués à moins prendre leur voiture avec la hausse de l'essence. Trop grands, alors que les clients valorisent le temps qu'ils ne passent pas à faire leurs courses. Trop de tentations, alors que les consommateurs surveillent leurs dépenses en temps de crise.
La concurrence de la proximité pour l'alimentaire, mais aussi des magasins spécialisés (bricolage, textile, électroménager, ameublement...) et du e-commerce s'est fait durement sentir.