Petrobras va lever 64 milliards de dollars de fonds en émettant de nouvelles actions, pour financer les coûteux investissements destinés à exploiter des gisements en eaux très profondes qui pourraient faire du Brésil l'un des premiers producteurs mondiaux de pétrole.
C'est l'une des plus importantes augmentations de capital jamais lancées: Petrobras va mettre en vente 2,1 millions de nouvelles actions ordinaires et 1,5 million de titres préférentiels.
Au prix actuel du marché, ces titres totaliseront 111 milliards de reais soit quelque 64 milliards de dollars (50 milliards d'euros).
Le prix de l'émission de titres sera fixé le 23 septembre et si la demande est forte, la compagnie pourra encore porter son offre à 74 milliards de dollars.
Cela représente une augmentation de capital correspondant à plus de 40% de la valeur de la compagnie, évaluée jeudi à quelque 150 milliards de dollars.
Cette émission d'actions permettra à Petrobras de mener à bien un ambitieux plan d'investissements de 224 milliards de dollars d'ici à 2014 pour exploiter les gigantesques gisements découverts en haute mer jusqu'à 7.000 mètres de profondeur, sous une épaisse couche de sel.
Petrobras possède des réserves confirmées de 14 milliards de barils de brut, réserves qui pourraient tripler avec le volume de pétrole enfoui dans ces gisements en eaux très profondes et faire du Brésil l'un des grands pays producteurs et exportateurs d'or noir.
La récupération de ce pétrole requiert toutefois des moyens techniques et financiers considérables.
Pour soutenir son offre, Petrobras va attribuer à l'Etat pour 42,5 milliards de dollars de nouvelles actions, en échange du droit d'exploiter 5 milliards de barils de réserves en eaux très profondes, avait annoncé le groupe mercredi.
A l'issue de cette opération, l'Etat brésilien augmentera mécaniquement sa participation au capital de Petrobras, qui s'élève actuellement à 39,2%.
Si le secteur privé n'acquiert pas le reste des titres mis en vente, l'Etat pourrait en acheter davantage pour contrôler jusqu'à 60% de Petrobras, selon l'expert Adriano Pires, du centre brésilien d'infrastructures (privé).
Les analystes interrogés par l'AFP jugeaient que l'émission d'action serait un succès, tout comme la Bourse de Sao Paulo où l'action Petrobras a clôturé en hausse de près de 5% vendredi soir.
L'action ordinaire Petrobras a gagné 4,71% a 32,71 reais (18,9 dollars) et l'action préférentielle 4,35% a 28,8 reais (16,6 dollars). Les échanges d'actions Petrobras ont représenté plus du quart (28,5%) des échanges du jour sur la plus grande Bourse d'Amérique latine.
Mais le groupe doit encore démontrer qu'il saura bien utiliser les fonds.
"L'opération sera réalisée avec succès", a commenté Tereza Fernandes, analyste de MB Asociados. "Mais il y a des doutes sur le taux de retour sur investissement (pour les acquéreurs des actions) et sur l'utilisation des fonds par Petrobras, en termes d'investissements", a-t-elle souligné.
Même inquiétude pour Adriano Pires, pour qui Petrobras devra "utiliser les fonds avec des critères strictement technique, faute de quoi elle devra d'ici deux ans de nouveau se recapitaliser" sur le marché.
"Comme la direction de Petrobras est très politique, j'ai peur que cet argent s'épuise très rapidement, car une direction politique provoque une grande inefficacité économique", a-t-il dit.
Le gouvernement de gauche du président Luiz Inacio Lula da Silva a changé la législation sur le pétrole pour permettre à Petrobras d'augmenter son capital et pour augmenter sa participation au sein de la compagnie, ce qui permettra à l'Etat de toucher plus d'argent sur les nouveaux gisements.
Lula a dit qu'une partie de la manne pétrolière serait destinée à l'éducation.
Les syndicats pétroliers sont eux contre la recapitalisation de Petrobras et réclament "le monopole de l'Etat sur le pétrole".
"Nous voulons que Petrobras redevienne à 100% publique. Le Brésil est déjà autosuffisant en pétrole et l'argent du pétrole doit être réinvesti dans des énergies propres et non pas dans des projets destinés à en faire un grand exportateur", a déclaré vendredi à l'AFP Emanuel Cancela, porte-parole du syndicat Sindipetro.
Petrobras prévoit une production moyenne de 3,9 millions de barils par jour en 2014 (contre 2,5 aujourd'hui), dont un million extrait en eaux très profondes. Il vise 5,4 mbj en 2020.