Ballotté depuis trois ans entre faux espoirs et promesses non tenues, le constructeur automobile Heuliez, basé à Cerizay (Deux-Sèvres), a été repris mercredi par le groupe français Baelen Gaillard Industrie couplé aux groupes allemands ConEnergy et Kohl, et veut croire cette fois à un réel nouveau départ.
Le tribunal de commerce de Niort a préféré l'offre du groupe franco-allemand à celle déposée par le fonds d'investissement malaisien Delamore and Owl Group Companies.
"C'est un des plus beaux jours de ma vie politique. On est entré au capital (à hauteur de 5 millions d'euros, soit 31%) de cette entreprise en laquelle nous avons toujours cru et ce, malgré les critiques", s'est réjouie Ségolène Royal, présidente PS de la région Poitou-Charentes.
Présente en fin de matinée au tribunal de commerce, Mme Royal s'est rendue ensuite à Cerizay pour y signer le protocole d'actionnariat avec les repreneurs.
Elle a précédé Christian Estrosi qui lui aussi s'est rendu sur le site. "Heuliez est sauvé, un savoir-faire est sauvé, c'est un beau soulagement", a-t-il dit à son arrivée dans l'après-midi.
Après avoir rencontré les repreneurs, le ministre a annoncé "l'engagement de l'Etat à hauteur de 10 millions d'euros pour le véhicule électrique et 2 à 3 millions d'euros pour la partie emboutissage".
"Mieux vaut tard que jamais", a commenté Ségolène Royal.
Les nouveaux repreneurs avaient les faveurs des salariés. "Leur offre est solide", souligne Gilles Bineau, délégué syndical CFDT (majoritaire). "Heuliez est sauvée mais nous sommes un peu déçus car ce n'est pas une reprise globale des salariés", a-t-il ajouté.
Pour Claude Point, délégué CFDT, secrétaire du CE, "l'ère Heuliez s'arrête, c'est un nouveau départ".
"C'est un grand jour pour Heuliez et nous sommes convaincus par l'électro-mobilité", a indiqué Oliver Bussick, un des manageurs de ConEnergy, lors d'une conférence de presse sur le site. "Nous espérons faire de nouveau briller le nom d'Heuliez qui a un savoir-faire. Et à deux (avec les groupes allemands), on est plus fort que tout seul", a indiqué pour sa part François De Gaillard.
Sur le site, à Cerizay, les salariés sont partagés entre soulagement et déception. "C'est une bonne nouvelle, Heuliez va continuer. Mais avec des salariés en moins", constate Eric Ferret, à la sortie de l'atelier. "Il était temps, l'ambiance était lourde", ajoute-t-il.
"En espérant que les repreneurs tiennent leurs engagements", lâche Laurent Morin, en regagnant sa voiture sur le parking.
BGI, société industrielle et familiale, reprend l'activité d'emboutissage. ConEnergy, société de services dans le secteur de l'énergie, associé à Kohl, société dans la santé, reprennent la partie véhicules électriques. 481 salariés, sur les 600, sont conservés.
Les nouveaux repreneurs apportent 13,1 millions d'euros et s'engagent à reprendre, dans les 15 prochains mois, 80 salariés sur les 120 licenciés.
Le groupe franco-allemand succède au groupe français Bernard Krief Consulting, spécialisé dans le conseil aux entreprises, et nommé le 8 juillet 2009 après un premier plan social et 400 licenciements sur 1.000 salariés.
Mais BKC s'est révélé incapable d'apporter l'argent promis et l'entreprise, en grosses difficultés financières, a été placée de nouveau un an plus tard, le 21 mai 2010, en redressement judiciaire.
La première tâche des nouveaux repreneurs va être de redonner confiance aux 600 salariés et de lancer rapidement la fabrication de la "Mia", le dernier projet de voiture électrique, qui constitue l'ultime espoir de survie d'Heuliez. Fondée en 1920 par Adolphe Heuliez, l'entreprise avait débuté avec la construction de carrioles.