Alors que les Français sont toujours plus nombreux à les bouder, les services de renseignements téléphoniques en 118 cherchent leur salut sur internet, notamment depuis le mobile, en espérant se financer par la publicité.
"Quand on fait le bilan, on s'aperçoit qu'on a fait grand bruit, au départ, de l'ouverture du marché des renseignements téléphoniques, sauf qu'entre-temps ce marché est tombé", constate Charles Tonlorenzi, PDG du 118 000.
L'arrivée en 2005 des 118, censés symboliser la libre concurrence après des années de règne sans partage du 12 de France Télécom, avait été largement médiatisée. On se souvient des moustachus du 118 218, parti le premier dans la course et le plus dépensier en communication.
Le pactole espéré a tourné à la déconfiture: en 2009, les 18 numéros encore actifs n'ont reçu que 102 millions d'appels et engrangé 157 millions d'euros.
En 2004, pour sa dernière année en solo, le 12 faisait beaucoup mieux, avec 270 millions d'appels et 300 millions d'euros.
Côté réclame, l'heure est à la discrétion. Les 118 n'ont investi en publicité que 67,5 millions d'euros bruts en 2009, selon Kantar Media, quatre fois moins qu'en 2006.
Le quatuor de tête n'a pas varié depuis le début.
Pour connaître leurs rangs, il faut se fier à leurs dires: le 118 218 (société Le Numéro) revendique 60% des appels, le 118 712 (France Télécom) s'estime à 30%, le 118 008 (PagesJaunes) à 12-13% et le 118 000 (racheté par ses dirigeants avec le fonds Newfund) à 10%.
"Le rythme de décroissance (du nombre d'appels) est d'environ 15% par an", note Valérie Shwartz, directrice du 118 008. Ailleurs en Europe, le déclin est à peu près similaire.
Cette baisse "s'accélère sous l'effet des smartphones", ces téléphones connectés à internet dont les ventes ont explosé à Noël, ajoute M. Tonlorenzi.
"L'internet mobile est le phénomène des six derniers mois" dans les renseignements, entraînant "une mutation d'usages", confirme Rayane Chawaf, directeur marketing du 118 712.
Tous les 118 se sont empressés de sortir leur application mobile - PagesJaunes se targue d'être présent sur les deux tiers des iPhones -, misant aussi sur leurs sites web.
Une nécessité alors qu'un sondage Ifop montrait fin 2009 que, pour trouver un numéro, 66% des Français privilégient internet, 62% l'annuaire papier mais seuls 25% composent un 118.
"Nous devons transformer notre activité en une activité internet car c'est là qu'est notre avenir", confie Susan Branchflower, directrice générale du 118 218.
Dans ce nouvel univers, "c'est un modèle économique différent, gratuit pour l'utilisateur, payant pour les annonceurs", souligne M. Chawaf.
Il peut s'agir de "publicités à côté des réponses à une requête ou la mise en avant de certains annonceurs" dans la liste des résultats, explique M. Tonlorenzi.
De quoi transformer le marché des renseignements en "un marché d'annuaires", où l'ennemi à abattre est le leader PagesJaunes.fr et ses 850 millions de visites par an.
Avec l'ascension du web, "la bataille se déplace mais il n'y a pas une substitution complète" au détriment des appels, souligne M. Chawaf, expliquant: "les clients professionnels, en mobilité, vont privilégier l'appel à un 118 parce qu'ils sont pressés et veulent le confort d'une personne qui va chercher pour eux".
"Quand on ne sait pas exactement comment formuler sa recherche, le 118 est parfait car en 40 secondes vous êtes mis en relation avec ce que vous cherchez", dit Mme Shwartz.
Donc, si le nombre d'appels "va continuer à baisser", il devrait finalement se maintenir à "un niveau plancher", prédit Mme Branchflower.