Reculer l'âge légal à 63 ans tout en allongeant la durée de cotisation à 45 ans permettrait de couvrir la moitié du déficit des retraites des salariés du privé: c'est l'une des hypothèses testées par le Conseil d'orientation des retraites (COR) pour nourrir le débat sur la réforme.
Dans un "dossier technique" publié mardi, le COR a évalué l'impact financier de ces différentes pistes, sans en préconiser aucune.
La retraite à 63 ans combinée à 45 ans de cotisations permettrait par exemple de couvrir 53% du déficit du régime général (salariés du privé) envisagé en 2050, estimé à environ 65 milliards d'euros, dans le cadre d'un scénario économique prévoyant une stabilisation du chômage à 4,5%.
Mais ce n'est qu'une des hypothèses testées, la plus défavorable aux salariés en termes de durée de cotisation nécessaire pour une retraite complète.
L'hypothèse qui soulagerait le plus les finances est celle qui combine une durée de cotisation allongée progressivement à 43,5 ans (pour la génération 1990) avec un âge légal porté à 65 ans d'ici 2035: elle permettrait de couvrir près de 60% des besoins de financement des retraites de base du privé d'ici 2050.
Dans sa synthèse, l'un principaux scénarios détaillé par le COR combine une retraite à 63 ans avec un allongement de la durée de cotisation à 43,5 ans: il permettrait de couvrir 36% du besoin de financement projeté pour 2050.
Dans tous les cas, la mise en application de ces mesures est envisagé progressivement, avec des hausses à raison d'un trimestre par an des bornes d'âge et des durée de cotisation pour une retraite complète.
Alors que ces chiffres sont scrutés par les acteurs de la concertation sur les retraites, le COR a fait assaut de précautions pour les présenter.
Leur préparation avait suscité de vives polémiques au sein de cette structure indépendante où syndicats, patronat, experts, parlementaires et représentants de l'Etat partagent leurs réflexions.
Des syndicats avaient jugé que certaines des variantes testées visaient à préparer l'opinion à des mesures difficiles préparées par le gouvernement.
Les chiffrages de mardi ont ainsi été publiés sous la seule responsabilité du secrétariat général du COR. Ces simulations "ont une vocation purement illustrative et ne constituent en rien des pistes de réforme", a insisté ce dernier.
"Démonstration est faite qu'à ne déplacer que les leviers, on ne règle pas le problème: on durcit les conditions d'accès, on creuse les inégalités, mais on ne résout même pas le problème", a réagi Jean-Louis Malys (CFDT), plaidant pour "une vraie remise à plat" du système.
Pour Danièle Karniewicz (CFE-CGC), "les scénarios du COR montrent aussi que les effets commencent à être produits après 2020 même si on prend des mesures tout de suite et en attendant il y a déjà un déficit donc il faut combler ce déficit et il faut trouver des recettes supplémentaires".
La CGT a souligné qu'ils montraient "des résultats limités pour un coût social exorbitant", estimant que des mesures comme le recul de l'âge légal auraient un "effet restrictif sur l'embauche des jeunes" et appauvriraient les salariés les plus âgés.
FO a vu dans ces chiffres la preuve qu'il fallait chercher de nouvelles ressources, au-delà des paramètres sur l'âge qui ne règlent pas les déficits.
Pour le député socialiste Pascal Terrasse, membre du COR, le gouvernement doit "pacifier le débat", en ouvrant le dossier "de la recherche de nouveaux financements, d'une nouvelle assiette de cotisations".
Interprétation inverse du côté patronal: selon le Medef, les simulations "montrent que des mesures d'âge et de durée de cotisation sont absolument nécessaires".