Prise dans la tourmente grecque, la Bourse de Paris a effacé six mois de gains au terme d'une semaine folle et devrait rester en proie à une nervosité extrême, alors que s'exacerbent les craintes sur l'avenir de la zone euro et que se profilent de durs plans d'austérité.
Le CAC 40 a fini vendredi sur une chute de 4,60% à 3.392,59 points, soit une baisse vertiginieuse de 424,40 points sur la semaine (-11,11%). Après une légère hausse lundi, l'indice a chuté sans discontinuer de mardi à vendredi. Depuis le début de l'année, le CAC 40 a perdu près de 14%.
Peu convaincu par l'officialisation du plan d'aide de l'Union européenne et du Fonds monétaire international en faveur d'Athènes, l'indice parisien avait plongé mardi dans le sillage de rumeurs sur une prochaine dégradation de la note de l'Espagne et n'est pas parvenu depuis à reprendre pied.
"La nature de la crise de la dette souveraine en Europe a changé du tout au tout, l?effet de contagion s?étendant des pays périphériques (jugés les moins solvables, ndlr) de l?Union européenne aux banques et aux marchés actions. Ce qui est en jeu, c?est l?avenir de la zone euro", avertissent les analystes de BNP Paribas.
Au-delà des craintes de propagation de la crise grecque, l'affolement des investisseurs se nourrit à présent d'inquiétudes sur les perspectives de la monnaie unique, mais aussi sur les conséquences de mesures de rigueur désormais envisagées, y compris en France.
La crise "va inévitablement amener les gouvernements à mettre de l'ordre dans leurs finances publiques et accroître les tensions déflationnistes", soulignent les analystes de BNP Paribas, regrettant que la Banque centrale européenne se soit montrée jeudi "prolixe en discours mais maigre en actions".
"Les marchés ont été nettement déçus. La BCE estime qu'elle répond correctement à la crise et les marchés pensent qu'elle pourrait et devrait en faire davantage", renchérissent les économistes de Crédit Suisse.
"Ceux qui espéraient une monétarisation des dettes souveraines en ont été pour leurs frais, mais il demandaient l'impossible. Par contre, on redoutait une attitude moins accommodante en matière de taux, et heureusement, il n'en a rien été", tempère Jean-Pierre Pierret, directeur de la stratégie chez Dexia.
"Nous sommes dans une période d'affolement irrationnel, où on ne regarde plus ce qu'on négocie. Cela rappelle la crise de 2008 avec son cortège de crises de nerfs, de généralisations hâtives, de ventes de détresse, où l'on oublie l'essentiel, la valeur des entreprises", estime M. Pierret.
"Or, les réalités des entreprises sont plutôt bonnes en matière de résultats et elles ont à présent cet avantage longtemps attendu qu'est la baisse de l'euro", ajoute-t-il.
Si le mini-krach intervenu jeudi à Wall Street pour des raisons encore mal éclaircies a encore contribué à exacerber la nervosité du marché, des indicateurs macro-économiques positifs, à l'image des créations d'emplois plus nombreuses qu'attendu aux Etats-Unis, ont trouvé en revanche peu d'écho.
"Entre rumeurs, dégradation des notes souveraines et défaillances informatiques, la psychologie s?immisce sur les places boursières et les bons résultats macroéconomiques passent au second plan", commentent les économistes de Saxo Banque.
La semaine prochaine, en dépit de la publication mercredi de la première estimation de PIB pour le premier trimestre dans la zone euro, la place parisienne devrait continuer de rester avant tout suspendue à l'évolution de la crise budgétaire et aux décisions des dirigeants de la zone euro.