Tout le monde se souvient de la fermeture des célèbres magasins Marks and Spencer en France et en Europe, quand son nouveau dirigeant, Luc Vandevelde, (surnommé par la presse britannique "Cool Hand Luc", "Luc la main froide") fût chargé de redresser le groupe en proie à une concurrence sévère, due à l'arrivée de nouvelles enseignes telles que Gap, Zara, Etam ou encore H&M. A l’époque, le président de Marks and Spencer décide de fermer la plupart des magasins à l'étranger, provoquant la suppression de 4.400 emplois en Europe entre 2000 et 2002.
La stratégie est payante mais le groupe ne retrouvera pas sa position de leader. Tesco, le plus grand détaillant du Royaume-Uni, le domine largement. Cependant, l’enseigne créée en 1884 veut continuer à s’adapter et s'interroge sur les moyens de reconquérir sa clientèle, laquelle a beaucoup évolué…Face à la montée des discounters et à la grande distribution "low cost" le groupe veut marquer sa différence et offrir plus et mieux à ses clients : "Cela nous a encouragé à devenir explicite dans le développement, l'origine et la durabilité des produits", affirme Paschal Little, Head of Technology de M&S. D'où le virage entamé en 2007 vers une stratégie "durable", incarnée par le lancement du "Plan A" : un vaste programme environnemental et écologique, ainsi nommé "parce qu'il n'y a pas de plan B pour sauver la planète", affirme le groupe.
Le plan A : la durabilité rentable ?
Devenir le distributeur le plus durable du monde, tel est désormais le credo de l'enseigne. 5 axes sont définis : réchauffement climatique, gestion des déchets, approvisionnement en matériaux durables, éthique et protection de la santé avec pas moins de 100 objectifs. En 2010, le plan A se renforce et comprend 180 objectifs. 50 % des 2,7 milliards d'articles devront répondre aux critères définis par le plan A d'ici 2015 et Sir Stuart Rose, le dirigeant de M&S ambitionne d'atteindre les 100% en 2020. Les produits devront être porteurs d'un label social ou environnemental indépendant reconnu ( certification Fairtrade ou Marine Stewardship Council -MSC), ou bien utiliser des matières premières durables, ou encore être issus de l'élevage en plein air (pour les viandes et les œufs par exemple). Effet d'annonce ? Des mesures concrètes sont prises : vêtements fabriqués en coton équitable, augmentation de l’offre de produits alimentaires bio, diminution de 25% du volume des emballages et réduction de 33% de sacs plastiques.
Réduire les émissions de GES
Depuis 2007, l’efficacité énergétique dans les magasins s’est améliorée de 10%. En outre, la création d’un camion aérodynamique innovant en forme de "goutte d’eau" a permis d’améliorer l’efficacité en carburant de 20% dans les opérations logistiques. Enfin, en matière de lutte contre les gaz à effet de serre, M&S veut limiter au maximum les importations, notamment par avion et en informer le consommateur le cas échéant. "Cela nous permettra de relever le défi du rapport Stern, qui est de réduire de 80 % nos émissions de gaz à effet de serre", explique le groupe à propos de ces mesures.
Cette reconversion verte a bien sûr un prix : 55 millions d'euros devront être investis dans les cinq années à venir. Mais Sir Stuart Rose croit fortement à la rentabilité de cette nouvelle stratégie : "Nous croyons que le développement durable est un élément clé du succès et le Plan A nous rendra plus efficaces. Il va permettre le développement de nouveaux marchés et la création d'une relation de confiance avec nos clients. C'est pourquoi il ne s'agit pas seulement de faire quelque chose de moralement correct, il y a aussi un fort sens commercial". Dernier engagement en date : l’enseigne a rejoint l’initiative RSPO (Roundtable on Sustainable Oil) pour développer son approvisionnement en huile de palme durable.
Pour autant, cette stratégie semble ne semble pas susciter, pour l’instant, l’enthousiasme du National Consumer Council (association des consommateurs britanniques) qui a réalisé un classement des supermarchés anglais en matière environnementale, selon 5 indicateurs (transport pour l’approvisionnement, déchets, agriculture, pêche, déforestation). Mark & Spencer et Sainsbury obtiennent la note moyenne "C", tandis que Tesco s'est vu affligé d'un "D".