Le secteur des travaux publics, à son tour rattrapé par la crise économique, craint de perdre 60.000 emplois en 2010 et 2011 si le gouvernement ne prend pas rapidement des mesures favorisant une politique d'investissement, notamment en faveur des grands travaux.
"Il y a urgence. Je viens d'alerter sur ce sujet la ministre de l'Economie Christine Lagarde, le ministre de l'Environnement Jean-Louis Borloo et le secrétaire d'Etat aux Transports Dominique Bussereau", a déclaré jeudi à l'AFP Patrick Bernasconi, le président de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP).
Après avoir subi un recul de son activité de 18% en deux ans (pour un chiffre d'affaires de 38 milliards d'euros), le secteur des travaux publics craint de devoir accélérer les suppressions d'emplois. Après avoir perdu 4.000 salariés et 9.000 intérimaires durant la seule année 2009, il comptait 300.000 emplois fin décembre.
"Si la situation économique actuelle perdure ce seront 30.000 emplois par an, soit 60.000 en 2010 et 2011, qui disparaîtront car les entreprises ne peuvent pas continuer à pratiquer des baisses de prix considérables pour décrocher des contrats, ce qui est une politique suicidaire à long terme", affirme M. Bernasconi.
Le retour de la croissance dans le secteur du BTP (bâtiment-travaux publics) ne peut pas être envisagé avant 2011, après un nouveau repli d'activité de 3,4% en 2010, selon une étude du cabinet Xerfi publiée mardi.
Aussi le président de la FNTP réclame la "définition d'un calendrier précis des réalisations et du financement des grands travaux décidés lors du Grenelle de l'Environnement car si les pouvoirs publics veulent faire moins, qu'ils nous le disent pour qu'on s'adapte".
"On sait que sur les 14 milliards d'euros prévus d'ici 2014 pour réaliser les projets d'infrastructure du Grenelle de l'Environnment et les contrats de plan Etat-région il manque entre 5,2 et 7 milliards d'euros selon que l'écotaxe sur les poids lourds entre ou non en application d'ici là", explique M. Bernasconi.
La FNTP est particulièrement déçue que le ministère de l'Ecologie vienne d'annoncer que l'éco-redevance sur les poids lourds, qui devait rapporter environ 1,2 milliard d'euros par an dont une très grande partie pour les infrastructures, ne sera pas mise en oeuvre avant la fin 2012, soit avec un an de retard.
L'éco-redevance poids lourds doit toucher tous les camions de plus de 3,5 tonnes, soit environ 600.000 camions français et 200.000 étrangers, sur les 12.000 km de routes nationales et des 2.000 km de routes départementales concernées.
"Ce n'est pas du tout un recul politique, c'est un problème technique", s'était défendu mercredi M. Bussereau.
Car, si le financement de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux et celui de la deuxième partie de la LGV-Est sont désormais assurés, il reste à mettre au point ceux pour la liaison entre Le Mans et Rennes et le contournement entre Nîmes et Montpellier ainsi que pour le canal Seine-Nord.
La profession déplore également l'abandon du projet du tram-train de la Réunion, (1,6 milliard de travaux).
"C'est regrettable pour l'emploi local. On était dans une logique de développement durable dans le droit fil du Grenelle", souligne M. Bernasconi.
Pour inciter les collectivités locales, devenues frileuses après la réforme de la taxe professionnelle, à commander plus de travaux, la FNTP réclame que le délai de remboursement de la TVA, déjà ramené de 2 ans à 1 an, soit désormais de 3 mois.