Les pays européens ont affiché lundi ouvertement leurs divergences sur l'urgence d'adopter un plan d'aide à la Grèce, à trois jours d'un sommet des dirigeants de l'UE qui s'annonce comme un test majeur et délicat pour la cohésion de la zone euro.
La présidence espagnole de l'UE et le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, ont demandé qu'un mécanisme de soutien à Athènes, qui ne serait utilisé qu'en cas de besoin, soit adopté lors d'un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement européens, jeudi et vendredi, à Bruxelles.
"La présidence espagnole va travailler pour ça" et "c'est un moment important pour l'avenir de l'UE, de l'euro", a déclaré le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, en marge d'une réunion avec ses homologues de l'Union européenne à Bruxelles.
Le dispositif passerait par des prêts bilatéraux coordonnés des pays de la zone euro, pour un montant de quelque 22 milliards d'euros et avec des taux d'intérêts inférieurs à ceux que paie aujourd'hui Athènes, selon une source européenne.
Il pourrait être complété par une contribution du Fonds monétaire international (FMI), une solution que n'a pas exclue lundi le chef de file des ministres des Finances de la zone euro Jean-Claude Juncker.
"Nous avons besoin à l'occasion de ce sommet d'une décision pour savoir comment gérer la Grèce. Sinon la grande incertitude (actuelle) risque de perdurer encore longtemps", a déclaré également M. Barroso dans une interview.
Athènes, confronté à une crise budgétaire sans précédent, estime mériter l'appui de ses partenaires après avoir pris de douloureuses mesures d'austérité pour réduire son énorme déficit. Le gouvernement juge aussi que les taux d'intérêt qu'il paye pour emprunter sur les marchés sont trop élevés.
Face à l'inflexibilité de Berlin, l'irritation grandit dans le pays. Le vice-Premier ministre grec Théodoros Pangalos a accusé lundi l'Allemagne de permettre à ses banques de "spéculer contre les obligations grecques" pour "gagner de l'argent".
Mais l'Allemagne reste ferme. Elle refuse de s'engager dans l'immédiat à payer pour les problèmes budgétaires de la Grèce.
Lors du sommet européen de Bruxelles, "jeudi et vendredi, il ne s'agit pas (de discuter) d'aides actuelles pour la Grèce", a une nouvelle fois martelé la chancelière Angela Merkel lundi à Berlin.
Elle a reçu l'appui notable dans son bras de fer de M. Juncker, pour qui "il n'est pas absolument nécessaire" que les dirigeants européens "se mettent d'accord cette semaine" sur un dispositif d'aide.
Alors que se rapproche une élection régionale cruciale, Mme Merkel doit composer avec une opinion publique très hostile: 32% des Allemands estiment même que la Grèce devrait sortir de la zone euro, selon un sondage publié lundi.
Cette situation met à rude épreuve les relations de Berlin avec certains de ses partenaires européens, à commencer par le premier d'entre eux, la France.
"La position française est ferme, nous ne pouvons pas, ne devons pas abandonner nos amis grecs", a déclaré à Bruxelles le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner, reconnaissant que sur la question de l'aide à ce pays "nous ne sommes pas en accord complet avec nos amis allemands".
Le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, a lui lancé un appel du pied à l'Allemagne pour l'exhorter à ne pas se désintéresser du sort de la Grèce.
Les Etats de la zone euro y sont entrés "pour partager un destin commun", a-t-il déclaré à Bruxelles en anglais, en français et chose plus rare, en allemand.