Le géant pétrolier britannique Shell, rattrapé en Bourse par son éternel rival BP et plombé par des difficultés dans le raffinage et au Nigeria, a annoncé jeudi vouloir poursuivre ses efforts de restructuration après un effondrement de ses bénéfices sur l'exercice 2009.
Le groupe a fait état jeudi d'une chute de 75% de son bénéfice ajusté au quatrième trimestre, à 1,18 milliard de dollars. Sur l'année, il s'est effondré de 69% à 9,8 milliards.
Cette nouvelle chute a de quoi surprendre, vu que les cours du pétrole étaient fortement remonté au quatrième trimestre 2009, par rapport à un an plus tôt, et que la production d'hydrocarbures du groupe n'a reculé que de 2% sur la même période, à 3,331 millions de barils équivalent pétrole par jour.
Mais les comptes du groupe ont été plombés par la crise économique, qui a pesé sur les cours du gaz naturel, et surtout, a provoqué d'énormes pertes dans ses activités de raffinage, en faisant chuter la demande mondiale de produits pétroliers, et en comprimant les marges du secteur, un souci partagé par ses concurrents.
Et le nouveau directeur général du groupe, Peter Voser, qui a pris ses fonctions l'an dernier, a prévenu que les activités de raffinage, qui traversent, selon lui, leur pire crise depuis 25 ans, allaient continuer à souffrir cette année, faute d'une reprise économique rapide.
Autre souci en perspective, le groupe doit compter avec la reprise de la violence au Nigeria, les rebelles du Mend ayant rompu en janvier une trêve qui durait depuis six mois et recommencé à attaquer de plus belle les infrastructures pétrolières du delta du Niger, où Shell est la principale compagnie pétrolière étrangère.
Résultat, la production du groupe dans les gisements terrestres au Nigeria, déjà tombée à 175.000 barils par jour au quatrième trimestre en raison de précédentes attaques, n'est plus que 150.000 barils actuellement.
Pendant ce temps, le grand rival BP, qui commence à tirer les fruits de sa propre restructuration douloureuse, commence à rattraper Shell en termes de valeur boursière: les deux groupes sont désormais au coude à coude, Shell pesant mardi 173 milliards de dollars, contre 171 pour BP.
Pour sortir de cette mauvaise passe, Peter Voser a l'intention d'amplifier la restructuration qu'il a lancée à son arrivée aux commandes.
Après avoir déjà supprimé 5.000 postes l'an dernier, dégageant au passage deux milliards de dollars d'économies annuelles, le groupe va supprimer encore un millier de postes en 2010, pour économiser un milliard supplémentaire.
Shell veut également accélérer le recentrage de ses activités de raffinage, en se défaisant des raffineries petites ou isolées, au profit des grands complexes.
Alors qu'il a déjà vendu pour 11 milliards de dollars d'actifs dans ce secteur, Shell va étudier l'éventuelle cession de 15% de ses capacités de raffinage existantes, et continue à négocier la vente à l'indien Essar de trois raffineries européennes. Il pourrait également se défaire de certaines activités de distribution.
Enfin, le groupe va geler le montant de son dividende trimestriel, après avoir versé l'an dernier plus de dix milliards de dollars à ses actionnaires.
Quand au Nigeria, M. Voser avait déjà annoncé en début d'année que Shell ne comptait plus désormais sur ce pays pour assurer sa croissance.
Et le groupe a annoncé la semaine dernière la cession de plusieurs dizaines de puits dans le Delta du Niger, peut-être un préalable à une réduction plus importante de ses activités dans cette région stratégique mais instable.