Depuis des années, Bruxelles dénonce le très particulier marché de l’électricité français. Un marché dans lequel EDF, qui dispose de l’important parc nucléaire national (le deuxième parc du monde : 58 réacteurs répartis sur tout le territoire), approvisionne encore plus de 95 % des foyers, laissant peu de place aux fournisseurs alternatifs d’électricité (GDF Suez, Poweo, Direct Energie). Et ce, malgré l’ouverture à la concurrence en juillet 2007.
Face aux remontrances européennes, le gouvernement a donc décidé d’agir : hier (19 janvier), un avant-projet de loi de réforme du marché a été présenté aux industriels et aux associations de consommateurs à la Défense pour favoriser la concurrence dans le secteur. Principale disposition de Nome (Nouvelle organisation du marché de l’électricité) : permettre aux concurrents d’EDF d’accéder à la production nucléaire à un prix attractif.
« Si l’on veut que la concurrence se développe, il faut permettre aux fournisseurs alternatifs d’accéder à cette capacité de production nucléaire, qui est un bien commun de la Nation », a estimé Pierre-Franck Chevet, directeur général de l’Energie et du Climat au ministère de l’Energie et du Développement durable. « Cette loi sera la plus importante pour l’organisation du secteur électrique en France depuis 1946 (date de création d’EDF, ndlr) », a quant à lui jugé Jean-Louis Mathias, directeur exécutif de l’électricien. La phase de concertation pourrait durer deux mois.
Réactions mitigées
Du côté des associations de consommateurs, on voit le projet d’un bon œil. Le maintien des tarifs réglementés en faveur des particuliers, qui devrait être effectif, a notamment été salué. En revanche, Henri Proglio, PDG d’EDF, ne veut pas en entendre parler : « Accepter un dispositif de ce type, ce serait accepter que la ‘boîte’ ne vaille plus rien. Si c’est pour faire ça, ce n’était pas la peine de me nommer », a-t-il lancé dans les colonnes des Echos.
Même chose pour les syndicats : La CGT fustige un projet de « démantèlement du groupe public », et la CFDT annonce une « phase de conflits sociaux sans précédents ». Les désaccords ont déjà fait prendre beaucoup de retard à la réforme : initialement prévue au 1er juillet 2010, elle risque fort de ne pas être applicable avant le milieu de l’année 2011.