Le Livret A a terminé l'année 2009 sur un chiffre de collecte exceptionnellement élevé, supérieur à seize milliards d'euros, mais la baisse historique de son taux, bloqué à 1,25% depuis le mois de juillet, devrait conduire à une poursuite du recul observé depuis le mois de mai.
De janvier à décembre 2009, 16,57 milliards d'euros ont été déposés sur les livrets A, le deuxième score le plus élevé après celui atteint en 2008 (+18,7 milliards d'euros). Le précédent record, de 8,4 milliards d'euros, avait été établi en 1995.
Au total, le stock d'épargne sur le livret A s'élevait fin décembre à 184,91 milliards d'euros, intérêts compris.
Ce bon crû s'explique principalement par l'ouverture de la distribution à toutes les banques le 1er janvier 2009. La réforme, exigée par Bruxelles, a mis fin à l'exclusivité de la Banque Postale, de Caisse d'épargne et du Crédit mutuel.
Séduit par des campagnes commerciales agressives, et par un taux de rémunération très attractif de 4%, les Français ont été nombreux à se doter de ce produit d'épargne populaire et sûr. Ainsi, quelque 8,5 millions de nouveaux livrets ont été ouverts en 2009 chez les nouveaux distributeurs, dont 4 pour le seul Crédit Agricole.
D'autres facteurs expliquent encore l'engouement des Français. Leur taux d'épargne, d'abord, a rarement été aussi élevé. Au troisième trimestre 2009, il a atteint 17% des revenus, un niveau qui n'avait pas été relevé depuis la fin de l'année 2002.
La crise a aussi fait sentir ses effets: les épargnants ont manifesté peu d'appétit pour les placements risqués, leur préférant des produits de père de famille comme le livret A, ou comme les contrats d'assurance-vie "en euro".
Même avec un taux de rémunération très bas, "le Livret A reste un produit très populaire, très lisible, qui correspond à une besoin de sécurité", commente Eric Delannoy, vice-président du cabinet Weave.
La baisse du taux, cependant, n'est pas neutre. Celui-ci est passé de 4% en janvier à 2,5% en février, 1,75% en mai et 1,25% en juillet, en raison du ralentissement très marqué de l'inflation et du recul historique des taux d'intérêt à court terme, deux indicateurs utilisés dans la formule d'ajustement automatique.
Conséquence, après l'importe collecte des quatre premiers mois (+23,76 milliards d'euros), la décrue a été quasiment ininterrompue (sauf en août), s'élevant au total à plus de sept milliards d'euros.
La baisse a contribué à rendre plus attractifs les contrats d'assurance vie, qui ont pu offrir des taux de rendement aux alentours de 4% en 2009.
A fin novembre, la collecte nette (versements sur les contrats moins prestations versées aux assurés) en assurance vie était ainsi en hausse de 65% par rapport aux onze premiers mois de l'an dernier.
L'augmentation des retraits sur le Livret A devrait se poursuivre en 2010. La ministre de l'Economie Christine Lagarde a décidé en janvier que le taux ne serait pas modifié le 1er février (date possible de changement avec le 1er mai, le 1er juillet et le 1er novembre).
Bien que très bas, le taux n'en est pas moins au-dessus de ce que voudrait la formule de calcul automatique, a souligné la ministre en annonçant sa décision.
Le taux pourrait passer à 1,5% en mai, selon Cyril Blesson, économiste chez Seeds Finance. Mais celà n'empêchera pas les livrets A de "continuer à subir des sorties significatives" de fonds au cours de 2010, selon Meyer Azogui, président de la société indépendant de conseil en gestion de patrimoine Cyrus Conseil.