L'échec du contrat pour la vente de quatre centrales nucléaires aux Emirats arabes unis va entraîner pour la filière nucléaire française une remise en cause de sa stratégie alors que se profilent d'autres gros contrats, principalement en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis.
"L'équipe de France a mis trop de temps à se mettre en ordre de bataille", a regretté lundi le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, dans Les Echos, affirmant toutefois être confiant dans l'EPR, le réacteur nucléaire de troisième génération développé par Areva, premier producteur mondial d'énergie nucléaire.
Areva participait à un consortium formé avec d'autres entreprises françaises (EDF, GDF Suez, Total, Vinci), qui s'est fait souffler dimanche par un consortium sud-coréen dirigé par Kepco un méga-contrat de 14,11 milliards d'euros pour la construction de quatre centrales nucléaires aux Emirats arabes unis.
"La filière française est mal coordonnée. Le problème doit être réglé par l'actionnaire majoritaire d'Areva et d'EDF, c'est-à-dire l'Etat, par la voix du gouvernement et si nécessaire par le président de la République", a déclaré à l'AFP François-Michel Gonnot, député UMP de l'Oise, vice-président du groupe d'études sur l'énergie à l'Assemblée nationale.
Pressentant les problèmes à venir, Nicolas Sarkozy avait chargé, début décembre, l'ancien patron d'EDF François Roussely de conduire "une étude approfondie sur l'avenir de l'énergie nucléaire civile".
Cette étude, qui doit être remise au printemps prochain, devra envisager "l'évolution du nucléaire civil à l'HORIZON 2030 dans l'ensemble de ses dimensions" et "déboucher sur des orientations concrètes, précisait la lettre de mission de M. Roussely.
Le temps presse car le marché mondial du nucléaire est actuellement en pleine expansion, en raison de l'explosion de la demande d'électricité malgré les menaces de réchauffement climatique.
Quatre EPR sont actuellement en construction: le premier en Finlande, deux en Chine et un en France, à Flamanville (Manche). La construction d'un deuxième EPR français à Penly (Seine-Maritime) a également été annoncée.
Les espoirs pour l'EPR se tournent vers la Grande-Bretagne où EDF, qui a racheté en 2008 l'opérateur nucléaire British Energy, doit construire quatre centrales sur les huit prévues dans le pays.
La filière nucléaire française mise aussi sur les Etats-Unis, où EDF vient d'acquérir 49,99% des activités nucléaires de l'électricien Constellation Energy afin de construire quatre réacteurs EPR sur les huit envisagés par les autorités américaines.
Areva devrait recevoir cette semaine une lettre d'intention du consortium d'industriels Fresno pour présenter une offre pour un autre EPR afin de fournir de l'électricité à des usines de dessalement d'eau de mer pour des cultures maraîchères en Californie, a-t-on appris lundi de sources proches du dossier.
Le groupe dirigé par Anne Lauvergeon, qui vise aussi l'Italie, a déposé en juillet une offre pour la réalisation en Inde de deux réacteurs dont les contrats devraient être signés en 2010.
Mais lundi le silence était de rigueur chez EDF, Areva et GDF Suez, peu diserts sur l'échec aux Emirats arabes unis. Le gouvernement aurait demandé de la discrétion pour ne pas compromettre d'autres négociations de contrats en cours, dont la vente de 60 avions de combat Rafale par le groupe Dassault.