Le rouble a recommencé à céder du terrain jeudi, après deux jours de rebond inattendu face au dollar et à l'euro, et ses zigzags poussent les investisseurs à spéculer sur une fin prochaine de la politique de dévaluation progressive suivie par la BCR, la banque centrale.
La devise russe cédait 2 kopecks à 32,75 roubles face au dollar et 28 kopecks à 42,65 roubles face à l'euro, vers 12H40 GMT.
Il renouait ainsi avec la tendance baissière observée depuis plusieurs mois, et qui s'accentue à mesure que la Russie s'enfonce dans la crise économique. Cette politique suscite une vive inquiétude au sein de la population russe qui a encore en mémoire son effondrement pendant la crise de 1998.
La BCR a une nouvelle fois indiqué jeudi avoir élargi le "corridor" dans lequel elle maintient le rouble face au panier dollar-euro qui lui sert de référence, ainsi qu'elle l'a déjà fait à une vingtaine de reprises depuis début novembre.
Ces mesures techniques lui servent à dévaluer en douceur la monnaie russe. Leur rythme s'est toutefois sensiblement accéléré depuis le début de l'année. Le rouble a ainsi cédé environ un quart de sa valeur face au panier euro-dollar depuis novembre.
Clemens Grafe, analyste de la banque UBS, explique cette hâte par le fait que "actuellement, investir dans les monnaies fortes est perçu comme plus rentable qu'investir dans une entreprise russe ou déposer de l'argent dans les banques".
"Nous pensons que cela renforce la pression sur la BCR pour laisser le rouble se dévaluer à un niveau durable", souligne-t-il dans une note.
Mardi et mercredi, pourtant, la devise russe avait pris de court les analystes en se mettant à grimper, au point que la banque centrale aurait été a contrario contrainte d'acheter plusieurs milliards de dollars pour empêcher une ascension trop brusque, rapporte la presse russe.
Beaucoup d'économistes ont mis ce rebond sur le compte d'une pénurie de roubles sur le marché à une période où les entreprises étaient tenues de s'acquitter de la TVA. D'autres y ont vu un "signal" aux spéculateurs.
Mais l'incertitude sur la politique de la BCR a été alimentée par des déclarations de hauts responsables russes suggérant un prochain tournant politique.
Le ministre des Finances Alexeï Koudrine a assuré cette semaine aux épargnants détenant des roubles qu'ils n'avaient aucun souci à se faire s'ils n'avaient pas l'intention de s'en servir d'ici à 2 ou 3 ans.
"Le rouble va redevenir stable et recommencer à s'apprécier, une fois passée la période d'affaiblissement (nécessaire pour accéder) à un nouvel équilibre en raison de la baisse des cours du pétrole", a-t-il dit selon l'agence Interfax.
De son côté, le conseiller économique du Kremlin, Arkadi Dvorkovitch, a déclaré cette semaine que "la période de baisse rapide du rouble approche de sa fin".
La politique de la BCR a été fréquemment critiquée pour son coût, car elle la contraint à intervenir quotidiennement et à grands frais sur les marchés des changes.
Selon les chiffres publiés jeudi, ses réserves de devises ont reculé de 30,3 milliards de dollars au cours de la semaine dernière, à 396,2 milliards de dollars. Elles ont plongé de 200 milliards de dollars depuis leur pic, atteint fin juillet 2008.