Face à la crise de liquidités qui menace la survie du constructeur automobile américain General Motors, le conseil d'administration serait prêt à envisager l'impensable, un placement sous le régime des faillites, contre l'avis du PDG Rick Wagoner, qui y est farouchement opposé.
Le "board" du premier constructeur automobile américain est prêt "à étudier toutes les options" pour assurer sa survie, y compris une mise en faillite, a rapporté vendredi soir le Wall Street Journal, s'appuyant sur des sources proches du dossier.
Une telle position de la direction, si elle est avérée, serait un terrible revers pour le leader incontesté de l'automobile mondiale, en passe de perdre son titre cette année face au japonais Toyota.
Elle marquerait aussi un désaveu du PDG Rick Wagoner, qui a ardemment défendu cette semaine, lors d'auditions du secteur devant le Congrès, que la voie de la faillite n'est pas une option viable pour le groupe.
Le patron de GM, aux côtés de ses homologues chez Ford et Chrysler, cherche avant tout à obtenir une rallonge de 25 milliards de dollars à l'aide publique au secteur, un soutien qui permettrait selon eux de parer à la crise de liquidités qui les menace à brève échéance, GM en premier. Une première enveloppe de 25 milliards a été votée par le Congrès en septembre, mais n'a pas encore été débloquée à ce jour.
Selon le quotidien, le conseil d'administration de GM, qui a apporté un soutien sans faille à M. Wagoner ces derniers mois, reconnaît qu'obtenir le déblocage de fonds supplémentaires "est une priorité de premier ordre". Mais la direction ne souhaiterait pas non plus écarter la possibilité d'un recours au régime des faillites.
Le régime des faillites prévoit la restructuration d'une entreprise sous la supervision d'un juge. Elle se traduit généralement par des concessions salariales et lèse les actionnaires comme les créanciers.
GM a indiqué au Wall Street Journal que le conseil d'administration avait effectivement abordé la question de la faillite mais qu'il ne considérait pas celle-ci comme "une solution viable répondant aux problèmes de liquidités du groupe". La direction étudie tous les moyens en son pouvoir pour éviter une mise en faillite, a également indiqué GM.
Ces désaccords surviennent alors que GM a prévenu ne pas pouvoir s'en sortir seul au-delà des deux prochains mois, entre une trésorerie qui s'épuise à vue d'oeil et des ventes en déclin continu depuis plusieurs trimestres. Sous la houlette de M. Wagoner, aux commandes depuis 2003, GM cumule plus de 72 milliards de dollars de pertes depuis 2005.
Le PDG de GM n'est pas le seul à être opposé à la voie de la faillite. Celui de Ford Alan Mulally et de Chrysler Bob Nardelli ont eux aussi agité devant le Congrès les conséquences "désastreuses" sur l'économie du pays d'une faillite de l'un d'entre eux. Un tel scénario pourrait menacer potentiellement 3 millions d'emplois, selon ces dirigeants, en raison de la forte interdépendance de plusieurs acteurs, à commencer par les fournisseurs.
Le patron de Ford a aussi affirmé que le placement d'un constructeur sous la protection de la loi sur les faillites mènerait plus sûrement à sa liquidation qu'à sa restructuration. Cela pourrait en effet faire s'effondrer les ventes en raison d'une perte totale de confiance chez les consommateurs, a renchéri Bob Nardelli. Les "Big Three" de l'automobile n'ont pas encore gagné la partie. Leurs auditions leur ont valu une salve de critiques, leurs détracteurs jugeant que ce sont eux, et non la crise, qui sont les premiers responsables de leurs difficultés, en n'ayant pas fait évoluer leur gamme de véhicules assez rapidement.
Plusieurs élus ont estimé qu'il fallait laisser les trois constructeurs passer par la faillite au lieu de leur signer "un chèque en blanc", afin qu'ils refondent leur modèle économique.
La majorité démocrate du Congrès s'est donné deux semaines pour faire voter un plan d'aide.