Voici des réactions d'économistes après l'annonce mardi d'un léger recul (-0,1%) des prix à la consommation en septembre et d'une hausse de 3% sur un an.
- Frédérique Cerisier (BNP Paribas)
L'inflation a poursuivi son repli au mois de septembre, une baisse qui reste alimentée par la détente des cours du pétrole et des prix des matières premières alimentaires. La diminution enregistrée ce mois-ci est toutefois plus modérée qu'en août : après un pic à 3,6% en données nationales, l'inflation était retombée à 3,2% en août, puis s'est établie à 3,1% en septembre.
Comme attendu, les prix de l'énergie, de l'alimentation ont contribué à la baisse du taux d'inflation. Dans le secteur énergétique, le recul des prix des produits pétroliers et des carburants est en partie compensé par l'augmentation des prix du gaz, ainsi que de ceux de l'électricité (après une hausse des tarifs intervenue le 18 août). Dans l'alimentation, la modération se poursuit, avec une baisse des produits hors frais, et une augmentation des produits frais plutôt modérée pour la saison. S'agissant des autres secteurs, on note une baisse des prix des services de transports et communications (-1,4% m/m). Un tel repli est habituel à la sortie de l'été avec une détente des tarifs associés aux congés et loisirs, mais la baisse enregistrée ce mois-ci semble relativement forte.
Dans l'ensemble, l'indice d'inflation sous-jacente augmente très légèrement, pour s'établir à 2,1%, contre 2,0% en août.
A l'avenir, le repli de l'inflation va continuer. Le recul des prix du pétrole se poursuit, en lien avec la dégradation importante des perspectives de croissance. D'importants effets de base viendront s'ajouter à ce mouvement pour tirer l'inflation à la baisse, notamment au mois de novembre prochain. Enfin, la contraction de l'activité pèsera nettement à l'avenir sur les composantes sous-jacentes de l'inflation (prix manufacturés, services).
Dans l'ensemble l'inflation pourrait être revenue autour de 2,3% fin 2008, et rester sur une tendance baissière l'an prochain.
- Alexander Law (Xerfi)
L'inflation n'est plus une menace pour l'économie française. Certes, sur un an, les prix à la consommation ont grimpé de 3% en septembre, mais la tendance est désormais à l'apaisement, ce dont témoigne le repli de 0,1% constaté d'un mois sur l'autre. En d'autres termes, si le besoin s'en fait sentir, la Banque centrale européenne dispose encore de cartouches pour baisser à nouveau ses taux, sachant que cette accalmie sur l'inflation n'est pas cantonnée à la France. Ceci étant, pour la consommation, le mal est déjà fait. Les prix continuent de grimper plus vite que les salaires et le pouvoir d'achat reste dans les limbes. Autrement dit, il y a une très forte probabilité pour que la croissance économique ait de nouveau été négative au troisième trimestre de 2008 (baisse que nous attendons autour de 0,1%), de sorte que l'économie française serait techniquement entrée en récession.
Il n'y a pas de mystère : l'apaisement sur le front de l'inflation est lié à la baisse des cours des matières premières, avec le pétrole en tête d'affiche. Ainsi, les prix des produits pétroliers ont reculé de 1,3% en septembre et de 6,7% sur les trois derniers mois cumulés. C'est une bonne nouvelle, car il s'agit là d'achats à très haute fréquence et surtout de prix qui sont très visibles des consommateurs.
Pour leur part, les prix des denrées alimentaires ont très légèrement augmenté, mais la hausse saisonnière des tarifs des produits frais est plus limitée que l'année dernière à pareille époque. Cela traduit, hélas, une demande en berne: préoccupés par leur pouvoir d'achat et par la dégradation des conditions sur le marché du travail, les Français ont également dû faire face à un ENVIRONNEMENT économique anxiogène. Au cours des derniers jours, les montagnes-russes des Bourses n'ont certainement pas contribué à leur redonner de la visibilité, quand bien même la tendance de ce début de semaine paraît euphorique.
Les prix des produits manufacturés restent particulièrement sages : sur un an, la hausse se limite à 0,6%. Il est vrai que dans un climat économique morose, il est bien difficile de procéder à des revalorisations tarifaires. Les progrès techniques, de même que l'intensité des pressions concurrentielles à l'échelle internationale, participent également de ce mouvement.
L'inflation est également maîtrisée dans les services, où elle n'atteint que 2,2% (avec une baisse de 0,8% en septembre par rapport à août). D'ailleurs, l'inflation sousjacente (c'est-à-dire hors prix administrés et éléments volatils) n'incite pas à l'inquiétude puisque elle s'élève à 2,1%. Il n'y a donc pas eu d'effets de "second tour" en France (à savoir la propagation de l'inflation depuis les matières premières vers les salaires) et il n'y en aura pas. Eu égard à la remontée brutale attendue sur le front du chômage, le pouvoir de négociation des salariés est particulièrement limité. Cela est vrai en France, mais également ailleurs dans la zone euro. La Banque centrale européenne a déjà montré qu'elle était prête à agir pour sortir l'économie réelle et financière de l'ornière et de nouvelles baisses de taux ne peuvent donc pas être exclues.
La baisse de l'inflation se poursuivra au cours des prochains mois. Le hic, c'est que le surcroît de pouvoir d'achat que cela implique sera contrebalancé par des destructions d'emplois et le regain du chômage. Il n'y a donc pas grand-chose à attendre sur le front de la consommation au moins jusqu'en fin d'année, d'autant plus que les ménages vont mettre de l'argent de côté. Pour notre part, nous n'attendons pas de réelle reprise avant la mi-2009.