La banque d'affaires américaine Lehman Brothers, déficitaire pour le deuxième trimestre d'affilée, a dévoilé mercredi une série de mesures destinées à consolider ses finances, sous toutefois aller jusqu'à nouer l'alliance avec un partenaire puissant espérée par les marchés.
La plus petite banque d'affaires de Wall Street a présenté dans l'urgence quatre chantiers, essentiellement des cessions d'actifs à venir.
L'établissement ne glane donc pas dans l'immédiat les capitaux tant attendus, mais l'exécution de son plan devrait se traduire par "des comptes bien nettoyés", "une réduction du risque et un redimensionnement du groupe", a indiqué son PDG Richard Fuld, lors d'une conférence téléphonique.
Quelques heures plus tôt, la banque coréenne KDB avait confirmé avoir mis fin aux discussions sur une prise de participation au capital de Lehman.
Une telle injection de fonds, espérée autour de 4 milliards de dollars, aurait permis à la banque américaine d'éponger une partie des 7,8 milliards de dollars de dépréciations qui ont plombé ses comptes du troisième trimestre.
Interrogé sur la possibilité d'un rachat de Lehman - qui ne vaut plus que 5,5 milliards de dollars en Bourse - M. Fuld a indiqué "ne pas avoir changé d'avis": "si quelqu'un nous faisait une offre attractive, nous en discuterions avec le conseil d'administration".
L'établissement vieux de 158 ans, qui a vu son action perdre plus de 50% depuis le début de la semaine, s'est d'ailleurs dit "engagé à examiner toutes les stratégies alternatives" possibles.
Commentant le vent de spéculations qui s'est intensifié ces derniers jours et a poussé le groupe à communiquer 8 jours avant la date prévue, le PDG s'est dit "confiant" dans la capacité du groupe à restaurer la confiance.
Le groupe, a-t-il dit, "a une solide situation de liquidités", avec 42 milliards de dollars disponibles, et un ratio de fonds propres "durs" - indicateur-clé - plus élevé que fin mai, à 11% des actifs.
Ces annonces, qui ont accompagné la publication d'une perte trimestrielle bien pire qu'attendue de 3,9 milliards, n'ont pas convaincu le marché. L'action a clôturé en baisse de 6,93% à 7,25 dollars.
"Les investisseurs continuent d'attendre l'émergence d'un acheteur ou d'un partenaire", expliquait Jeffrey Ham, analyste du site Briefing, jugeant "facile de mettre en vente des actifs, mais moins facile de trouver un acheteur".
"L'incapacité de Lehman à trouver un investisseur ou un acheteur est un signe de la méfiance qui entoure la compagnie", a-t-il renchéri.
La direction de Lehman Brothers a expliqué de son côté avoir agi avec détermination pour réduire son exposition au marché du crédit hypothécaire à risquew. Son portefeuille dans l'immobilier résidentiel a ainsi été réduit de près de 50% entre fin mai et fin août, à 13,2 milliards de dollars.
Autre mesure-clé, le groupe a mis en vente une participation majoritaire de ses activités de gestion d'actifs, de gestion de fortune et d'investissement, espérant en tirer une plus-value de plus de 3 milliards.
"Nous sommes dans les étapes finales de la vente", a assuré le directeur financier Ian Lowitt, qui espère un accord "très très prochainement".
Lehman va aussi transférer "la vaste majorité" de ses actifs - entre 25 et 30 milliards de dollars - dans l'immobilier commercial à une nouvelle société indépendante et cotée en bourse.
Enfin, Lehman va réduire a presque néant son dividende annuel, à 0,05 dollar contre 0,68 dollar jusqu'ici, pour économiser 450 millions de dollars.
Les annonces de Lehman n'ont pas empêché les agences de notation Moody's et Standard and Poor's d'annoncer qu'elles réfléchissaient à un possible abaissement de ses notes.
Désormais, "la capacité de Lehman à infléchir le sentiment du marché à son égard" est cruciale, a jugé Moody's.
Standard and Poor's s'est dite "inquiète du potentiel de bénéfices de Lehman sur le long-terme, au vu des changements décidés dans son modèle économique, des dégâts potentiels causés par les tumultes récents (sur les marchés) et de l'incertitude quand à une amélioration des conditions de marché".