Nicolas Sarkozy a finalement décidé que le Revenu de solidarité active (RSA), généralisé dans les délais souhaités par Martin Hirsch, au 1er juillet 2009, sera financé par une taxation de 1,1% des revenus du capital, un choix critiqué par le Medef.
L'annonce, révélée mercredi par les Echos et que le chef de l'Etat doit officialiser jeudi lors d'un déplacement à Laval (Mayenne), met fin au suspense entretenu depuis plusieurs mois sur l'avenir du RSA, dispositif destiné à remplacer le RMI et l'Allocation de parent isolé (API) et permettant un cumul partiel des revenus du travail et de solidarité.
Renonçant à redéployer la prime pour l'emploi (PPE), le Chef de l'Etat opte pour une taxe, qui concernera l'ensemble des revenus du capital à l'exception de tous les livrets d'épargne et des revenus obligataires, et qui entrera en vigueur le 1er janvier 2009.
Il prend ainsi de court l'opposition, qui l'accusait de "prendre aux moins pauvres pour aider les plus pauvres".
Mais il s'attire la grogne du Medef : "Pour financer une bonne idée, pourquoi avoir comme seule solution celle d'une taxe en plus ?", a regretté sa présidente Laurence Parisot.
Expérimenté dans 34 départements, le RSA a fait l'objet de nombreux débats, y compris au sein de l'UMP, en raison de son coût, et son report à 2010 avait même été évoqué.
Sarkozy a tranché pour une généralisation à l'été 2009. Et la taxe sur les revenus du capital devrait permettre de financer l'intégralité du 1,5 milliard de crédits supplémentaires, en année pleine, destiné au RSA, qui bénéficiera à 3,7 millions de ménages.
Jusque-là taxés à 11%, les revenus du capital le seront désormais à hauteur de 12,1%, a-t-on précisé à l'Elysée.
En avril, Nicolas Sarkozy avait annoncé que le RSA sera financé par un redéploiement de la PPE, qui ne sera finalement pas touchée, de même que ne seront pas remis en cause les droits connexes à l'actuel RMI (exonérations de la taxe d'habitation et de la redevance) ou la prime de Noël.
Le taux de cumul entre les revenus de solidarité et du travail a été fixé à 62% du salaire. "Concrètement, si quelqu'un qui touchait 100 euros de RMI reprend un travail payé 100 euros, il pourra rajouter à son salaire une part de 38 euros de son ancienne allocation", a-t-on expliqué à l'Elysée.
La présidente du Medef, Laurence Parisot, a mis en cause "la méthode et les moyens" pour financer le revenu de solidarité active (RSA), estimant que l'accumulation de taxes risquait d'asphyxier l'économie française.
"Ce n'est pas la première fois que l'on voit qu'il y a des bons objectifs qui sont fixés par le gouvernement (...) mais que la méthode et les moyens qui sont choisis finissent par altérer, par abîmer le projet en lui-même", a déclaré jeudi Mme Parisot sur France 2.
"Si à chaque nouvelle idée, on invente une nouvelle taxe, (...) on va être totalement asphyxiés, très vite", a encore déclaré la présidente du Medef, pointant également du doigt une récente augmentation par le gouvernement des cotisations retraites "qui va toucher et les salariés et les entreprises".
Les propriétaires bailleurs privés regroupés dans l'Union nationale pour la propriété immobilière (UNI), ont demandé "au président de la République d'envisager un autre système de financement".
"Le gouvernement de droite, après la suppression de l'abattement forfairaire, la réduction du dépôt de garantie à un mois, la multiplication des diagnostics obligatoires, va frapper une nouvelle fois l'immobilier en taxant encore plus les revenus fonciers", a déploré l'UNI qui revendique 250.000 adhérents.
Assureurs et associations d'épargnants ont jugé la décision "inopportune" en pleine déprime de la Bourse et à l'heure où 12 millions de personnes ont une assurance vie et 6,5 millions sont des petits porteurs.
"Satisfaite" d'une taxation du capital pour financer le RSA, la Fnars (associations de réinsertion) a estimé que celui-ci "ne peut pas tenir lieu de seule politique sociale".
Enfin, François Bourguignon, président du comité d'évaluation du RSA, a estimé que l'action du RSA sur la réduction de la pauvreté ne fait "aucun doute" mais que ses effets incitatifs pour la reprise d'emploi sont encore incertains.
M. Bourguignon, ancien chef économiste de la Banque mondiale, a regretté que le RSA soit généralisé avant la fin des travaux d'évaluation. "Il est dommage que le calendrier politique ne soit pas synchrone avec le calendrier académique", a-t-il déclaré dans les Echos.